LIVRE 3
Chapitre premier
1.
Lorsque, contre toute esp�rance, les h�breux eurent ainsi �t� sauv�s, ils
furent de nouveau cruellement en peine, tandis qu'on les menait vers le mont
Sina�. La contr�e �tait absolument d�serte, d�nu�e de toute production
propre � leur subsistance et extr�mement pauvre en eau ; non seulement
elle ne pouvait rien fournir aux hommes, mais elle n'�tait m�me pas capable de
nourrir aucune esp�ce animale ; en effet, c'est une terre s�che, d'o� ne
sort aucune humidit� propice � la v�g�tation. C'est par un tel pays qu'ils
�taient contraints de cheminer, aucune autre route ne leur �tant ouverte. Des
lieux ant�rieurement parcourus ils avaient emport� de l'eau, selon l'ordre de
leur chef, et, quand cette eau fut �puis�e,
ils essay�rent d'en retirer de puits. Ce fut un travail p�nible � cause de la
duret� du sol ; mais ce qu'ils trouvaient �tait amer, non potable et, au
surplus, en quantit� tr�s minime.
En marchant ainsi, ils arriv�rent aux approches du soir � Mar, localit�
qu'ils appel�rent de ce nom � cause de la mauvaise qualit� de l'eau - en
effet, l'amertume
se dit mar - ; et l�, �puis�s par cette marche ininterrompue et
par le manque de nourriture � � ce moment ils n'en avaient plus du tout -,
ils font halte. Un puits se trouvait l�, c'�tait une raison de plus pour y
demeurer ; sans doute, il ne pouvait � lui seul suffire � une si grande
arm�e, cependant c'�tait un l�ger encouragement pour eux de l'avoir trouv�
dans de tels parages ; car ils avaient ou� dire � ceux qui allaient aux
informations qu�ils n'en rencontreraient plus aucun en poursuivant leur route.
Mais cette eau-l� �tait am�re, et non seulement les hommes ne pouvaient la
boire, mais les b�tes de somme m�me ne la supportaient pas.
2.
Mo�se, voyant leur d�couragement et l'inefficacit� des paroles en une
telle circonstance, - car ce n'�tait pas une arm�e v�ritable, capable
d'opposer � la contrainte de la n�cessit� la force virile ; l'�lan g�n�reux
de leurs sentiments �tait enray� par la foule des enfants et des femmes, qui
n'�taient pas de force � recevoir les enseignements de la raison -, Mo�se
donc �tait dans le plus grand embarras, parce qu'il faisait siennes les
souffrances de tous. En effet, on n'avait recours � personne qu'� lui ;
tous l'adjuraient, les femmes pour leurs enfants, les maris pour leurs femmes,
de ne pas se d�sint�resser d'eux, mais de leur procurer quelque moyen de
salut. Il se met alors � supplier Dieu de d�barrasser l'eau du mauvais go�t
qu'elle avait et de la rendre potable. Et comme Dieu consentit � lui faire
cette faveur, ayant saisi l'extr�mit� d'un b�ton qui se trouvait sur le sol
� ses pieds, il le fendit par le milieu,
dans le sens de la longueur, puis, l'ayant jet� dans le puits, il persuada aux
h�breux que Dieu avait pr�t� l'oreille � ses pri�res et avait promis de
rendre l'eau telle qu'ils la d�siraient, pourvu qu'ils ex�cutassent ses
ordres, non avec mollesse, mais avec ardeur. Ceux-ci demandant ce qu'il leur
faudra faire pour que l'eau s'am�liore, il ordonne � ceux qui �taient dans la
force de l'�ge de tirer l'eau du puits, en leur disant que ce qui resterait au
fond, quand ils en auraient eu vid� la plus grande partie, serait potable. Ils
se mirent � l��uvre, et l'eau travaill�e et purifi�e par leurs coups
incessants
devient bient�t bonne � boire.
3.
Partis de l�, ils arrivent � Elis ;
de loin, cette localit� avait belle apparence, car elle �tait plant�e de
palmiers, mais, quand on en fut pr�s, on se convainquit, au contraire, que c'�tait
un m�chant lieu ; car ces palmiers, qui n'�taient pas plus de
soixante-dix, croissaient p�niblement et demeuraient tout au ras du sol, faute
d'eau, tout l'endroit �tant sablonneux. M�me des sources qui se trouvaient l�,
au nombre de douze, il ne jaillissait pas assez d'eau pour les arroser ; et
comme rien n'en pouvait sourdre ni s'�lever en l'air, elles ne donnaient que de
rares filets de liquide et l'on creusait le sable sans rien rencontrer ;
encore le peu d'eau qu'ils parvenaient � recueillir goutte � goutte se
trouvait impropre � tout usage, tant il �tait trouble. Et les arbres �taient
trop d�biles pour porter des fruits, faute d'eau pour leur donner de la vigueur
et de l'�lan. Aussi incriminait-on le chef et l'accablait-on d'injures :
ces mis�res, ces �preuves malheureuses, c'�tait par lui qu'on les endurait,
disaient-ils. Ils en �taient � leur trenti�me jour
de marche ; les provisions qu'ils avaient emport�es �tait compl�tement
�puis�es,
et, comme ils ne trouvaient rien en route, ils d�sesp�raient compl�tement.
Tout � la pens�e de leur malheur pr�sent, qui les emp�che de se souvenir des
bienfaits qu'ils doivent � Dieu d'une part, � la vertu et � l�intelligence
de Mo�se de l'autre, ils n'ont pour leur chef que de la col�re, et s'�lancent
pour le lapider, comme s'il �tait le
plus responsable de leur d�tresse actuelle.
4.
Mais lui, devant cette foule ainsi surexcit�e et anim�e contre lui de
sentiments violents, fort de l'appui de Dieu et de la conscience qu'il a d'avoir
veill� sur ceux de sa race, s'avance au milieu d�eux tandis qu'ils vocif�rent
et tiennent encore des pierres dans leurs mains ; avec son aspect si agr�able
et son �loquence si persuasive pour la foule, il commence � apaiser leur col�re,
les exhorte � ne pas oublier, sous l'impression des difficult�s actuelles, les
bienfaits ant�rieurs, et � ne pas chasser de leurs pens�es, parce qu'ils
souffrent pr�sentement, les gr�ces et les faveurs consid�rables et inesp�r�es
qu'ils avaient re�ues de Dieu. Ils doivent compter qu'ils seront tir�s aussi
des embarras actuels, gr�ce � la sollicitude divine, car, vraisemblablement,
c'�tait pour �prouver leur vertu, pour savoir de quelle force d'�me ils �taient
dou�s, quelle m�moire ils conservaient des services d�j� rendus, et s'ils
n'y reporteraient point leur pens�e sous l'influence des maux actuels, que Dieu
les accablait maintenant de ces tourments. Il leur reproche de ne savoir ni les
endurer, ni se souvenir d'un heureux pass�, en faisant si peu de cas de Dieu et
du dessein selon lequel ils ont quitt� l'�gypte, et en montrant tant d'humeur
contre lui-m�me, serviteur de Dieu, lui qui ne leur a jamais menti, ni dans ses
discours, ni dans les ordres qu'il leur a donn�s selon les instructions
divines. Puis il leur �num�re tout, comment les �gyptiens ont �t� d�truits
en voulant les retenir de force contre la volont� de Dieu, comment le m�me
fleuve se changea pour ceux-l� en sang, de sorte qu'ils ne purent boire de ses
eaux, tandis que pour eux-m�mes elles restaient potables et douces, comment,
traversant la mer qui s'�cartait d'eux au loin en leur ouvrant un chemin tout
nouveau, ils y trouv�rent le salut pour eux-m�mes, tandis qu'ils voyaient
leurs ennemis p�rir ; comment, lorsqu'ils manquaient d'armes, Dieu leur en
procura abondamment ; enfin il leur dit toutes les circonstances o�, quand
ils paraissaient � deux doigts de leur perte, Dieu les avait sauv�s �
l'improviste, quelle puissance �tait la sienne, qu'il ne fallait donc pas non
plus d�sesp�rer maintenant de sa providence, mais patienter sans col�re, en
songeant que le secours ne peut tarder, m�me s'il ne vient pas imm�diatement,
avant toute �preuve f�cheuse, et consid�rer que ce n'est pas par indiff�rence
que Dieu temporise, mais bien pour �prouver leur courage et leur amour de la
libert�, � afin de savoir, dit-il, si, � l'occasion, vous pourriez
supporter g�n�reusement pour elle la privation d'aliments et le manque d'eau,
ou si vous pr�f�rez l'esclavage, comme les b�tes que leurs ma�tres domptent
et nourrissent copieusement en vue des services qu'ils en attendent �. Il
ajoute que, s'il craint quelque chose, ce n'est pas tant pour sa propre s�curit�,
- car ce ne sera pas un malheur pour lui de mourir injustement -, que pour eux-m�mes ;
il a peur qu'en lan�ant des pierres contre lui, ils n'aient l'air de m�priser
Dieu.
5.
Il les calme ainsi, arr�te leurs bras pr�ts � le lapider et les am�ne
� se repentir de l'acte qu'ils allaient commettre : mais, ayant song� que
cette agitation provoqu�e par la n�cessit� n'�tait pas d�raisonnable, il r�fl�chit
qu'il devait aller supplier et invoquer Dieu, et, mont� sur un observatoire �lev�,
il lui demande de procurer quelque secours au peuple et de l'arracher � sa d�tresse,
- car c'�tait en lui que se trouvait leur salut et en nul autre -, et de
pardonner au peuple ce qu'il venait de commettre sous l'empire de la n�cessit�,
car la race des hommes est naturellement port�e � se plaindre et � r�criminer
dans la mauvaise fortune. Dieu promet de prendre soin d'eux et
de leur fournir ces ressources tant souhait�es. Mo�se, ayant entendu cette r�ponse
de Dieu, retourne aupr�s du peuple. Ceux-ci, en le voyant tout r�joui des
promesses divines, passent de l'abattement � une humeur plus gaie, et lui,
debout au milieu d'eux, dit qu'il vient leur apporter de la part de Dieu un
secours contre les embarras pr�sents. Et, peu apr�s, une quantit� de cailles
(cette esp�ce d'oiseaux abonde, plus que toute autre, dans le golfe Arabique)
traverse ce bras de mer et vient voler au-dessus d'eux ; et, fatigu�es de
voler, habitu�es, d'ailleurs, plus que les autres oiseaux � raser la terre,
elles viennent s'abattre sur les H�breux. Ceux-ci, les recueillant comme une
nourriture pr�par�e par Dieu, soulagent leur faim. Et Mo�se adresse des
actions de gr�ce � Dieu pour les avoir secourus si vite et comme il l'avait
promis.
6.
Aussit�t apr�s ces premiers secours en vivres, Dieu leur en envoya une seconde
fois. En effet, tandis que Mo�se �l�ve les mains en pri�re, une ros�e tombe
� terre, et, comme elle adh�rait en se coagulant
� ses mains, Mo�se, soup�onnant que c'�tait l� un aliment envoy� par Dieu,
la go�te, et, charm�, tandis que le peuple, dans son ignorance, la prend pour
de la neige et l'attribue � l'�poque de l'ann�e o� l'on se trouvait,
il leur apprend que cette ros�e descendue du ciel n'est pas ce qu'ils
supposent, mais qu'elle est destin�e � les sauver et � les nourrir ; en
la go�tant, ils s'en convaincraient. Ceux-ci, imitant leur chef, eurent plaisir
� manger de cette substance,
car elle tenait du miel par sa saveur douce et d�licieuse et ressemblait �
cette esp�ce d'aromate nomm�e bdella ;
la grosseur �tait celle d'une graine de coriandre. Ils mirent � la r�colte
une ardeur extr�me. Mais il leur �tait recommand� � tous �galement de n'en
r�colter chaque jour qu'un assaron
(c'est le nom d'une mesure), cet aliment ne devant jamais leur faire d�faut ;
c'�tait l� une pr�caution afin que les faibles ne fussent pas emp�ch�s d'en
prendre par les forts, qui profiteraient de leur vigueur pour faire une r�colte
plus copieuse. Ceux qui, n�anmoins, recueillaient plus que la mesure prescrite
n'avaient aucun avantage pour la peine qu'ils se donnaient, car ils ne
trouvaient rien de plus qu'un assaron ; et tout ce qu'on mettait de c�t�
pour le jour suivant ne servait plus � rien : les vers et l'amertume l'ab�maient,
tant cet aliment �tait divin et extraordinaire. Il rempla�ait pour ceux qui en
mangeaient tous les autres aliments absents.
Et encore aujourd'hui
tout ce lieu est arros� d'une pluie semblable � celle que jadis, par faveur
pour Mo�se, Dieu envoya pour leur servir de nourriture. Les H�breux appellent
cet aliment manna,
car le mot man est une interrogation dans notre langue et sert �
demander : � Qu'est-ce que cela ? �
Ils ne firent donc que se r�jouir de cet envoi du ciel et ils us�rent de cette
nourriture pendant quarante ans, tout le temps qu'ils furent dans le d�sert.
7.
Lorsque, partis de l�, ils arriv�rent � Raphidin,
tourment�s par une soif extr�me, -car apr�s avoir dans les premiers jours
rencontr� quelques sources, ils se trouvaient maintenant dans un pays
absolument d�pourvu d'eau -, leur situation �tait p�nible et ils recommen�aient
� s'irriter contre Mo�se. Mais lui, �chappant � grand peine aux transports
de la foule, se met � prier Dieu, et lui demande, de m�me qu'il leur avait
donn� � manger dans le besoin, de leur procurer aussi � boire, car c'en �tait
fait de leur reconnaissance pour la nourriture qu'ils avaient re�ue, si la
boisson leur faisait d�faut. Dieu ne diff�ra pas longtemps d'accorder cette
faveur ; il promit � Mo�se de produire une source abondante qui
jaillirait d'un endroit impr�vu. Et il lui commande de frapper de son b�ton la
roche qui se trouvait l� devant leurs yeux ; c'�tait d'elle qu'ils
recevraient en abondance tout ce qu'ils d�siraient ; il veillerait aussi
� ce que l'eau leur appar�t sans peine ni travail. Mo�se, ayant re�u ces
promesses de Dieu, revient aupr�s du peuple, qui �tait dans l'attente et
tenait les regards fix�s sur lui ; car on l'avait d�j� aper�u qui
descendait vivement de la colline. D�s qu'il arrive, il leur dit que Dieu
voulait les d�livrer aussi de cette d�tresse et qu'il daignait m�me les
sauver d'une fa�on inesp�r�e ; de la roche jaillirait pour eux un
courant d'eau. Tandis que cette nouvelle les stup�fie � la pens�e d'�tre
encore oblig�s, tout �puis�s qu'ils sont par la soif et le voyage, � tailler
dans le rocher, Mo�se le frappe de son b�ton ; celui-ci s'entrouvrant, il
s'en �chappe une eau abondante et parfaitement limpide. Eux sont frapp�s de l'�tranget�
de ce spectacle et rien qu�� son aspect, leur soif se calme d�j� ; ils
en boivent, et ce liquide leur parait agr�able et d�licieux et tel qu'un vrai
pr�sent de Dieu. Ils en con�oivent aussi de l'admiration pour Mo�se, si fort
en honneur aupr�s de Dieu et ils offrent des sacrifices pour remercier Dieu de
la providence dont il les a entour�s. L'�crit
d�pos� dans le temple atteste que Dieu avait pr�dit � Mo�se qu'il ferait
ainsi sortir de l'eau du rocher.
Chapitre
II
1.
Comme le renom des H�breux s'�tait d�j� fort r�pandu partout et qu'on
parlait beaucoup d'eux, il advint que les gens du pays ne furent pas m�diocrement
effray�s. S'envoyant mutuellement des d�putations, ils s'invitent � repousser
et � tenter d'exterminer ces intrus. Les instigateurs de cette entreprise �taient
les habitants de la Gobolitide et de P�tra,
qui s'appellent Amal�cites ; c'�tait le plus belliqueux des peuples de ce
pays. Leurs rois, par des messages adress�s des uns aux autres ainsi qu'aux
peuples voisins, s'exhortent � faire la guerre aux H�breux ;
une arm�e d'�trangers, disaient-ils, qui s'�taient d�rob�s � la servitude
des �gyptiens, s'installait pr�s d'eux
pour leur nuire : � On aurait tort de les m�priser ; c'est
avant qu'ils se fortifient et que leurs ressources augmentent, et qu'ils
commencent � nous attaquer, se sentant encourag�s en ne nous voyant opposer
aucune r�sistance, qu'il est prudent et sage de les d�faire en les punissant
de leur agression et de ce qu'ils y ont commis, et non lorsqu'ils auront mis la
main sur nos villes et nos richesses. Ceux qui tentent de ruiner la puissance
naissante de leurs ennemis font preuve de plus de sagacit� que ceux qui
s�opposent � son accroissement apr�s qu'elle a d�j� progress� ; car
ceux-ci semblent ne s'indigner que de l'exc�s de leurs avantages, mais ceux-l�
ne leur laissent jamais prendre barre sur eux �. Apr�s ces avis adress�s
aux peuplades voisines ainsi qu'entre soi, on d�cida d'entrer en lutte avec les
H�breux.
2.
Comme Mo�se ne s'attendait � aucune hostilit�, il �prouva de l'embarras et
de l'inqui�tude devant cette attitude des gens du pays ; et, alors que
ceux-ci �taient d�j� pr�ts au combat et qu'il fallait affronter le p�ril,
la foule des H�breux se trouva dans une vive agitation ; manquant de tout,
elle allait se battre avec des gens �quip�s de tout � merveille. Mo�se alors
entreprend de les consoler, les exhorte � reprendre courage en se fiant au
suffrage de Dieu ; �lev�s par lui � la libert�, ils triompheraient de
ceux qui se disposaient � les attaquer pour la leur disputer. Ils devaient
consid�rer leur arm�e comme assez nombreuse et pourvue d'armes, d'argent, de
vivres, de tout ce dont la pr�sence enhardit l'homme qui va combattre, la seule
assistance de Dieu leur donnait tout cela ; tandis que l'adversaire �tait
peu nombreux, d�sarm�, faible, facile � vaincre m�me par de moins forts
qu'eux, d�s que Dieu le voulait.
Ils savaient quel secours Dieu procurait, d'apr�s de nombreuses exp�riences,
plus tragiques que la guerre ; car la guerre, on la fait contre des hommes ;
mais les difficult�s o� ils s'�taient trouv�s devant la faim et la soif,
devant les montagnes et la mer quand ils ne savaient par o� fuir, c'�tait gr�ce
� la seule bienveillance divine qu'ils les avaient surmont�es. Il les invitait
aujourd'hui � montrer la plus grande ardeur, car ils auraient de tout en
abondance s'ils triomphaient de leurs ennemis.
3.
C'est par ces discours que Mo�se rendait courage � la foule, et, appelant les
chefs de tribu et les magistrats s�par�ment et tous ensemble, il engageait les
plus jeunes � ob�ir aux plus anciens et ces derniers � �couter leur g�n�ral.
Ceux-ci, dont les �mes s'exaltaient en vue du danger, et qui, pr�ts pour la
terrible affaire, esp�raient qu�un moment viendrait o� l'on serait d�livr�
de ces maux, priaient Mo�se de les conduire sur l'heure et sans retard contre
leurs ennemis, tout d�lai pouvant arr�ter leur ardeur. Mo�se, apr�s avoir
choisi dans la foule tous ceux qui pouvaient se battre, met � leur t�te Josu�
(J�so�s), fils de Noun (Nav�chos),
de la tribu d'�phra�m, un homme tr�s courageux, qui supportait vaillamment
les fatigues, qui savait fort bien r�fl�chir et parler, honorait Dieu d'une pi�t�
singuli�re que Mo�se lui avait enseign�e, et poss�dait l'estime des H�breux.
Il rangea quelques hommes arm�s autour de l'eau pour la garde des enfants et
des femmes et de l'ensemble du camp. Ils pass�rent toute la nuit en pr�paratifs,
� r�parer les armes endommag�es, le regard tendu vers leur chef, tout pr�ts
� s'�lancer au combat quand Mo�se leur en donnerait le signal. Mo�se aussi
passe la nuit � enseigner � Josu� comment il rangera l'arm�e en bataille.
Quand le jour commence � para�tre, il exhorte � nouveau Josu� � ne pas se
montrer dans l'action inf�rieur aux esp�rances fond�es sur lui et � s'acqu�rir
dans son commandement la consid�ration de ses troupes pour ses exploits, il
exhorte encore, chacun � part, les plus notables d'entre les H�breux, et bient�t
il donne l'�lan � toute la foule r�unie sous les armes. Lui-m�me, apr�s
avoir anim� l'arm�e par ses paroles et tout ce travail pr�paratoire, se
retire sur la montagne en confiant l'arm�e � Dieu et � Josu�.
4.
Les adversaires en viennent aux mains, le combat s'engage avec
acharnement et l'on s'anime les uns les autres. Tout le temps que Mo�se tient
les bras lev�s en l'air, les Amal�cites faiblissent devant les H�breux. Mais
Mo�se, ne pouvant supporter la fatigue de cette tension des bras, et constatant
que chaque fois qu'il les laissait retomber, r�guli�rement les siens se
trouvaient avoir le dessous, il ordonne � son fr�re Aaron et au mari de sa s�ur
Mariamme, Our(os),
de se tenir de chaque c�t� de lui pour soutenir ses mains et ne pas le laisser
se fatiguer dans son intervention tut�laire. Cela fait, les H�breux remportent
une victoire �crasante sur les Amal�cites. Et ceux-ci eussent tous p�ri, si
la nuit survenant n'e�t arr�t� le carnage. C'�tait une tr�s belle victoire
et tr�s opportune que remport�rent l� nos anc�tres, car ils triomph�rent de
ceux qui s'�taient jet�s sur eux et ils effray�rent les peuples voisins tout
en se procurant de nombreuses et magnifiques richesses pour prix de leurs
efforts. S'�tant empar�s, en effet, du camp des ennemis, ils acquirent des
ressources consid�rables tant pour l'usage public que pour leur usage
particulier, eux qui pr�c�demment avaient manqu� m�me du n�cessaire. Et ce
leur fut, non seulement pour le pr�sent, mais encore pour l'avenir, une source
de bienfaits que le succ�s de ce combat car ils n'asservirent pas seulement la
personne de leurs assaillants, mais aussi leur moral ; et pour tous les
peuples voisins, apr�s la d�faite de ces premiers adversaires, ils devinrent
redoutables. En m�me temps, ils s'empar�rent d'une grande quantit� de
richesses. Car beaucoup d'argent et d'or fut saisi dans le camp, ainsi que des
vases d'airain qui servaient pour les repas, profusion aussi d'or et d'argent
monnay�s,
puis tous les tissus et les ornements servant aux armures, d'autres objets de
parure et d'�quipement, un butin vari� de b�tes de somme et tout ce qui suit
habituellement une arm�e en campagne.
Les H�breux con�urent une haute id�e de leur propre valeur et leur vertu se
retrempa ; d�sormais ils ne recul�rent devant aucun effort, estimant que
par l'effort tout peut se conqu�rir.
5.
C'est ainsi que se termina cette lutte. Le lendemain, Mo�se fit d�pouiller les
cadavres des ennemis et r�unir les armures laiss�es par les fuyards ; il
distribua des r�compenses aux vaillants et fit l'�loge de leur chef Josu�,
dont les exploits �taient attest�s par l'arm�e tout enti�re. Chez les H�breux
personne n'avait p�ri, mais les ennemis avaient eu tant de morts qu'on ne
pouvait m�me les compter. Apr�s avoir offert des sacrifices d'actions de gr�ce,
il �rige un autel et appelle Dieu du nom de Donneur de victoire et il pr�dit que les
Amal�cites p�riraient d'une ruine compl�te, que nul d'entre eux ne
survivrait, parce qu'ils s'�taient jet�s sur les H�breux, alors qu'ils se
trouvaient dans un pays d�sert, en pleine d�tresse ; puis il restaura
l'arm�e par des festins.
Tel fut leur premier engagement, livr� apr�s leur sortie d'�gypte contre
d'audacieux agresseurs. Apr�s qu'ils eurent c�l�br� la f�te en l'honneur de
leur victoire, Mo�se, ayant attendu quelques jours, emmena, apr�s ce combat,
les H�breux rang�s en bon ordre. D�j� beaucoup d'entre eux �taient arm�s.
Avan�ant par petites �tapes, le troisi�me mois apr�s la sortie d'�gypte, il
arrive au mont Sina�,
o� s'�taient pass�s le miracle du buisson et ses autres visions que nous
avons d�j� rapport�s.
Chapitre
III
1.
Ragou�l,
son beau-p�re, instruit de ses succ�s, s'en vient joyeusement � sa rencontre
et fait bon accueil � Mo�se, � Sapphora
et � leurs enfants. Mo�se se r�jouit de l'arriv�e de son beau-p�re et, apr�s
avoir offert un sacrifice, il donne un festin
au peuple non loin du buisson qui avait �chapp� � la combustion du feu. Tout
le peuple, rang� par familles, prenait part au festin ; Aaron et les
siens, s'�tant adjoint Ragou�l, chantaient des hymnes � Dieu, auteur et
dispensateur de leur salut et de leur libert�. Ils c�l�braient aussi leur g�n�ral,
dont le m�rite avait tout fait r�ussir � souhait. Et Ragou�l se r�pandit en
�loges � l'adresse du peuple pour la reconnaissance que celui-ci t�moignait
� Mo�se et il admira, d'autre part, Mo�se pour l'ardeur virile qu'il avait
mise � sauver les siens.
Chapitre
IV
1.
Le lendemain, Ragou�l aper�oit Mo�se au milieu du tumulte des affaires ;
il tranchait, en effet, les diff�rends de tous ceux qui le lui demandaient, car
tous venaient � lui, pensant que le seul moyen d'obtenir justice, c'�tait de
l'avoir, lui, pour arbitre ; et aux vaincus m�mes la d�faite semblait l�g�re,
persuad�s qu'elle �tait due � la justice et non � la cupidit�. Sur le
moment, Ragou�l garde le silence, ne voulant emp�cher personne d'avoir recours
aux talents du chef, mais, une fois le tumulte apais�, il le prend � part, et,
demeur� seul avec lui, il lui enseigne ce qu'il doit faire. Il lui conseille de
laisser � d'autres le tracas des petites affaires et de garder toute sa
vigilance pour les plus importantes et pour le salut du peuple ; pour ce
qui �tait de juger, d'autres H�breux s'en trouveraient capables ; mais,
quant � veiller � la s�curit� de tant de myriades d'hommes, nul autre ne le
pourrait qu'un Mo�se. � Ainsi conscient de ton m�rite, dit-il, et du r�le
que tu as jou� en concourant avec Dieu au salut du peuple, laisse � d'autres
le soin d'arbitrer les contestations : toi, consacre-toi sans cesse au seul
culte de Dieu en cherchant les moyens de tirer le peuple de son d�nuement
actuel. Suivant mes avis sur les affaires humaines, tu d�nombreras l'arm�e
soigneusement et tu la diviseras par groupes de dix mille hommes,
auxquels tu d�signeras des chefs choisis, puis par groupes de mille. Ensuite tu
les diviseras en groupes de cinq cents, puis de cent, puis de cinquante...
Ces groupes auront des chefs qui tiendront leur titre du nombre d'hommes qu'ils
commanderont ; ils seront reconnus partout le peuple pour des gens de bien
et des hommes justes, et conna�tront des diff�rends des gens de leur groupe.
Pour les affaires plus importantes, ils en r�f�reront, au sujet de la d�cision
� prendre, aux magistrats plus �lev�s ; et, si � ceux-ci �galement les
difficult�s de l'affaire �chappent, c'est � toi qu'ils la renverront. Il en r�sultera
ainsi deux choses : les H�breux obtiendront justice, et toi, par ton
commerce assidu avec Dieu, tu le rendras plus propice � l'arm�e �.
2.
Ragou�l l'ayant ainsi exhort�, Mo�se accepte avec plaisir ses avis et fait
tout conform�ment � son plan, sans dissimuler l'origine d'une telle mesure et
sans s�en approprier le m�rite, mais en d�signant clairement l'inventeur au
peuple. M�me il a inscrit dans les livres le nom de Ragou�l comme l'inventeur
de ladite organisation, estimant qu'on fait bien de rendre un fid�le t�moignage
au m�rite,
quelque gloire que puissent rapporter � celui qui les enregistre � son compte
les inventions d'autrui ; c'est ainsi qu'on peut conna�tre jusqu'en ce
trait les vertus de Mo�se.
Mais nous aurons d'excellentes occasions de parler de ces vertus dans d'autres
passages de notre ouvrage.
Chapitre
V
1.
Mo�se, ayant convoqu� le peuple, leur dit qu'il partait, lui, vers le mont
Sina� pour s'entretenir avec Dieu et qu'apr�s avoir re�u de lui un oracle,
il reviendrait le leur apporter ; quant � eux, il leur commanda de transf�rer
leur campement pr�s de la montagne, par pr�f�rence pour le voisinage de Dieu.
Cela dit, il monte au Sina�, qui �tait la montagne la plus haute de ces
parages et dont les dimensions �taient si extraordinaires et les escarpements
si abrupts que, non seulement elle �tait impossible � gravir, mais qu�on ne
pouvait m�me la contempler sans se fatiguer le regard, d'autant plus que ce
qu�on disait du s�jour de Dieu la rendait redoutable et inaccessible.
Cependant les H�breux, conform�ment aux instructions de Mo�se, changent leur
camp de place et viennent occuper le pied de la montagne, s'exaltant � la pens�e
que Mo�se reviendrait d'aupr�s de Dieu avec l'annonce de ces biens qu'il leur
avait fait esp�rer. Tous en f�tes, ils attendent leur chef, observant toute
puret� en g�n�ral et, en particulier, s'abstenant du commerce des femmes
durant trois jours, comme il le leur avait prescrit, et priant Dieu qu'apr�s un
accueil favorable, il donne � Mo�se un pr�sent qui les fasse vivre heureux.
Ils font aussi des repas plus somptueux et mettent un soin particulier � se
parer en m�me temps que leurs femmes et leurs enfants.
2.
Ils passent ainsi deux jours en festins. Le troisi�me avant le lever du soleil,
une nue se pose sur tout le camp des H�breux, qui n'avaient jamais vu encore
pareil ph�nom�ne, et environne l'emplacement o� ils avaient �tabli leurs
tentes. Et, tandis que le reste du ciel restait serein, des vents imp�tueux,
amenant des pluies violentes, font rage, des �clairs terrifient les regards, et
la foudre qui s'abat atteste la pr�sence d'un Dieu propice aux v�ux de Mo�se.
Au sujet de ces �v�nements chacun de mes lecteurs peut penser ce qu'il voudra ;
quant � moi, je suis oblig� d'en faire un r�cit conforme � ce qui est
consign� dans les saints Livres. Pour ce qui est des h�breux, ce qu'ils virent
et le fracas qui frappait leurs oreilles les mit dans une vive agitation, car
ils n'y �taient pas accoutum�s et la rumeur qui courait au sujet de cette
montagne, qui passait pour le s�jour de Dieu, frappait singuli�rement leur
imagination. Ils se tenaient contre leurs tentes, mornes, croyant que Mo�se
avait p�ri victime de la col�re de Dieu, et s'attendant pour leur part au m�me
sort.
3.
Tel �tait leur �tat d'esprit quand appara�t Mo�se, rayonnant et plein de
hautes pens�es. Sa vue les d�livre d'inqui�tude et leur fait concevoir pour
l'avenir de meilleures esp�rances ; l'air redevint serein et pur des r�centes
perturbations, quand Mo�se arriva. La-dessus, il convoque le peuple en assembl�e
pour entendre ce que Dieu lui a dit. D�s qu'ils sont r�unis, il se place sur
une hauteur, d'o� tous pouvaient l'entendre, et dit :
� H�breux, Dieu, comme nagu�re, m'a accueilli avec bont� et, pour vous
prescrire des r�gles de vie heureuse et un gouvernement ordonn�, il va para�tre
lui m�me dans le camp. C'est pourquoi, par �gard pour lui et tout ce qu'il a d�j�
fait pour vous, ne m�prisez pas ce que je vais dire en me consid�rant, moi qui
vous parle, ou sous pr�texte que c'est une bouche humaine qui vous le transmet.
Car, si vous consid�rez l'excellence de mes paroles, vous reconna�trez la
grandeur de celui qui l'a con�u et qui, dans votre int�r�t, n'a pas d�daign�
de me les confier. Ce n'est pas Mo�se, fils d'Amaram et de Jocabed, c'est celui
qui a contraint le Nil � rouler en votre faveur des flots sanglants et dompt�
par toutes sortes de fl�aux l'orgueil des �gyptiens, celui qui, � travers la
mer, vous a ouvert un chemin, celui qui a fait descendre une nourriture du ciel
quand vous �tiez dans le besoin, celui qui a fait jaillir du rocher l'eau qui
vous manquait, celui gr�ce � qui Adam re�ut les produits de la terre et de la
mer, gr�ce � qui No� �chappa au d�luge, gr�ce � qui Abram, notre anc�tre,
cessant d'errer, s'�tablit dans la Chanan�e, celui qui a fait na�tre Isac de
parents d'�g�s, qui orna Jacob des vertus de douze fils, gr�ce � qui Joseph
gouverna la puissance des �gyptiens, c'est celui-l� qui vous favorise de ses
commandements en se servant de moi comme interpr�te. Qu'ils aient toute votre v�n�ration ;
soyez-en plus jaloux que de vos enfants et de vos femmes. Vous aurez une vie de
f�licit� si vous les suivez ; vous jouirez d'un pays fertile, d'une mer
� l'abri des orages, et vos enfants na�tront d'une fa�on normale et vous
serez redoutables � vos ennemis. Car, admis � la contemplation de Dieu, il m'a
�t� donn� d'entendre sa voix immortelle, tant il prend souci de votre race et
de sa conservation ! �
4.
Apr�s ces paroles, il fait avancer le peuple avec les femmes et les enfants,
pour entendre Dieu leur parler de leurs devoirs, afin que la vertu de ces
paroles ne f�t pas alt�r�e par le langage humain, qui les e�t affaiblies en
les transmettant � leur connaissance. Tous entendent une voix venue d'en haut,
elle leur parvient � tous, de mani�re qu'ils ne perdent aucune de ces dix
paroles que Mo�se a laiss�es �crites sur les deux tables. Ces paroles, il ne
nous est plus permis de les dire
explicitement, en toutes lettres, mais nous en indiquerons le sens.
5.
La premi�re parole nous enseigne que Dieu est Un, qu'il ne faut v�n�rer que
lui seul.
La deuxi�me nous commande de ne faire aucune image d'animal
pour l'adorer, la troisi�me de ne pas invoquer Dieu en vain, la quatri�me
d'observer chaque septi�me jour en nous abstenant de tout travail, la cinqui�me
d'honorer nos parents, la sixi�me de nous garder du meurtre, la septi�me de ne
point commettre d'adult�re, la huiti�me de ne point voler, la neuvi�me de ne
pas rendre de faux t�moignages, la dixi�me de ne rien convoiter qui
appartienne � autrui.
6.
Et le peuple, apr�s avoir entendu Dieu lui-m�me leur dire ce que Mo�se avait
annonc�, se r�jouit de ces paroles et l'assembl�e fut dissoute. Les jours
suivants, venant � maintes reprises vers la tente de Mo�se, ils le pri�rent
de leur procurer aussi des lois de la part de Dieu. Mo�se �tablit ces lois et
il leur indiqua ult�rieurement d'une fa�on compl�te comment on devait les
pratiquer : j'en ferai mention en temps opportun. Mais, pour la majeure
partie de ces lois, je les remets � un autre livre, car j'en ferai l'objet
d'une exposition sp�ciale.
7.
Les choses en �taient l�, quand Mo�se gravit de nouveau le mont Sina�, apr�s
en avoir averti les H�breux. C'est sous leurs yeux qu'il effectua son
ascension, mais, comme le temps passait - il y avait quarante jours qu'il s'�tait
s�par� d'eux -, la crainte saisit les H�breux qu'il ne f�t arriv� malheur
� Mo�se, et, entre toutes les infortunes qui les avaient atteints, rien ne les
chagrinait comme de penser que Mo�se avait p�ri. Il y avait contestation parmi
les hommes : les uns disaient qu'il �tait tomb� victime des b�tes
fauves, - c'�taient principalement les gens dont les dispositions lui �taient
hostiles qui �mettaient cette opinion -, les autres disaient que la divinit�
l'avait retir� � elle. Mais les gens sens�s, qui n'avaient de pr�f�rence
personnelle pour aucun de ces deux avis, qui pensaient que mourir sous la dent
des b�tes �tait un accident humain et qui estimaient vraisemblable aussi que,
gr�ce � la vertu dont il �tait orn�, il e�t �t� transport� par Dieu aupr�s
de lui, trouvaient dans ces pens�es la qui�tude. Pourtant, en songeant qu'ils
�taient priv�s d'un patron et d'un protecteur tel qu'ils ne pourraient en
trouver de semblable, ils ne cessaient de s'affliger extr�mement, et ni
l'attente o� ils �taient de quelque bonne nouvelle � son sujet ne les
autorisait � prendre le deuil, ni ils ne pouvaient s'emp�cher de pleurer et de
montrer de l'abattement. Quant � lever le camp, ils n'osaient, Mo�se leur
ayant prescrit de l'attendre l�.
8.
Lorsque quarante jours furent �coul�s et autant de nuits, Mo�se revint sans
avoir go�t� d'aucun aliment
de ceux qui sont en usage parmi les hommes. Son apparition remplit l'arm�e de
joie ; il leur d�voila la sollicitude que Dieu t�moignait � leur �gard,
disant qu'il lui avait montr� pendant ces jours comment ils devraient
s'administrer pour vivre heureux, et que Dieu voulait qu'on lui f�t un
tabernacle o� il descendrait quand
il viendrait aupr�s d'eux, � afin que, dit-il, dans nos d�placements
nous l'emportions avec nous et qu'il ne nous soit plus n�cessaire de monter au
Sina�, mais que Dieu lui-m�me, fr�quentant ce tabernacle, soit pr�sent �
nos pri�res. Ce tabernacle se fera dans les dimensions et avec l'am�nagement
qu'il a lui-m�me indiqu�s et vous vous mettrez � ce travail activement �.
Cela dit, il leur montre deux tables
o� se trouvaient grav�es les dix paroles, cinq sur chacune d'elles.
EL l'�criture �tait de la main de Dieu.
Chapitre
VI
1.
Joyeux de ce qu'ils avaient vu et de ce qu'ils avaient ou� dire � leur chef,
ils ne se lass�rent pas de d�ployer tout le z�le dont ils �taient capables.
Ils apportent de l'argent, de l'or et du cuivre, des bois de la nature la plus
pr�cieuse et qui n'avaient rien � craindre de la putr�faction,
du poil de ch�vre, et des peaux de moutons, les unes teintes en violet
d'hyacinthe, les autres en �carlate ; d'autres offraient l'�clat de la
pourpre ; d'autres avaient la couleur blanche. Ils apportent aussi des
laines teintes de ces m�mes couleurs, de fin lin byssus, avec des pierres
encastr�es dans leurs tissus, de celles que les hommes ench�ssent dans l'or et
qui leur servent de parure de prix, enfin une quantit� d'aromates. C'est avec
ces mat�riaux que Mo�se construisit le tabernacle, qui ne diff�rait en rien
d'un temple portatif et ambulant. Tous ces objets ayant �t� rassembl�s avec
empressement, chacun ayant fait ce qu'il pouvait et au-del�, il pr�pose des
architectes aux travaux, selon les instructions de Dieu, ceux-l� m�mes que le
peuple e�t choisis s'il en e�t eu le droit. Voici quels �taient leurs noms
- car on les trouve consign�s dans les livres saints - : B�s�l��l(os),
fils d'Ouri, de la tribu de Juda, petit-fils de Mariamme, la s�ur du chef, et
Eliab(os), fils d'Isamach(os), de la tribu de Dan. Mais
le peuple mettait tant d'ardeur � s'engager dans cette entreprise que Mo�se
dut les �carter, en faisant proclamer qu'il y avait assez de monde ; c'est ce que les
artisans lui avaient dit. Ils se mettent donc � la confection du tabernacle. Et
Mo�se leur donna, conform�ment au plan de Dieu, les indications d�taill�es
au sujet des mesures, au sujet de la grandeur du tabernacle et des objets qu'il
devait contenir pour le service des sacrifices. Les femmes elles-m�mes rivalisaient de z�le �
fournir les v�tements sacerdotaux et tout ce qui �tait n�cessaire encore �
l'ornementation de l��uvre et au service divin.
2.
Quand tout fut pr�t, l'or, [l'argent], l'airain, et les tissus, Mo�se, apr�s
avoir prescrit une f�te et des sacrifices selon les moyens de chacun, dresse le
tabernacle.
Il commence par mesurer avec soin une cours
de cinquante coud�es de large et de cent coud�es de long ; il y plante
des pieux de cuivre de cinq coud�es de haut, vingt de chaque c�t� dans le
sens de la longueur et dix dans la largeur du c�t� qui faisait le fond. Des
anneaux �taient adapt�s � chacun de ces pieux. Les chapiteaux �taient en
argent, les socles, qui ressemblaient � des pieds de lance, �taient de cuivre
et s�enfon�aient dans le sol.
Aux anneaux �taient fix�es des cordes dont l�autre extr�mit� �tait attach�e
� des piquets de cuivre longs d'une coud�e qui, pour chaque pieu, s'enfon�aient
en terre de fa�on � rendre le tabernacle immobile sous la pouss�e des vents.
Un voile de byssus extr�mement fin r�gnait sur tous ces pieux ; il
pendait du chapiteau jusqu'au socle, se d�ployant avec ampleur et il
environnait tout cet espace d'une enceinte qui ne paraissait pas diff�rer d'un
mur. Tel �tait l'aspect de trois faces de l'aire sacr�e. Dans la quatri�me
(cette derni�re, qui avait cinquante coud�es, formait le front de l'ensemble)
vingt coud�es s'ouvraient en porte, o� se trouvaient de part et d'autre deux
pieux � l'imitation de pyl�nes ; ces pieux �taient enti�rement rev�tus
d'argent
� l'exception des socles, lesquels �taient en cuivre. De chaque c�t� du
porche,
se dressaient trois pieux solidement introduits dans les montants qui
soutenaient les portes et fortement ajust�s ; autour de ces pieux aussi �tait
tendu un voile tiss� de byssus. Mais devant les portes, sur une longueur de
vingt coud�es et une hauteur de cinq, r�gnait un voile de pourpre et d'�carlate,
tiss� avec l'hyacinthe et le byssus, garni de quantit� d'ornements de couleurs
vari�es, mais sans rien qui repr�sent�t des formes d'animaux.
En dedans des portes se trouvait un bassin de cuivre
destin� aux aspersions, avec un fondement du m�me m�tal ; c'est l� que
les pr�tres pouvaient se laver les mains et r�pandre de l'eau sur leurs pieds.
C'est ainsi que l'enceinte de la cour sacr�e �tait am�nag�e.
3.
Quant au tabernacle, Mo�se le dresse au milieu en le tournant du c�t� de
l'orient, afin que le soleil, aussit�t � son lever, lui envoy�t ses rayons.
Sa longueur s'�tendait sur trente coud�es, sa largeur sur dix ; l'un des
murs �tait au sud, l'autre au nord ; derri�re le fond se trouvait le
couchant. Il fallait lui donner une hauteur �gale � la largeur. Chaque flanc
�tait form� de solives de bois au nombre de vingt,
taill�es en forme rectangulaire, larges d'une coud�e et demie, avec une �paisseur
de quatre doigts.
Elles portaient de tous les c�t�s un rev�tement de lames d'or, sur les
parties int�rieures comme sur les parties ext�rieures. Chacune d'elles �tait
pourvue de deux tenons s'enfon�ant dans deux socles ; ceux-ci �taient en
argent et avaient chacun une ouverture pour recevoir les tenons. Le mur
occidental avait six solives, fix�es toutes soigneusement les unes aux autres,
de sorte que, les joints se trouvant bien clos, elles semblaient ne faire qu'un
mur; elles �taient dor�es sur la partie interne et externe. Ainsi le nombre
des solives �tait en proportion de la longueur de chaque face. [Sur les grands
c�t�s] il y en avait vingt et l'�paisseur de chacune d'elles �tait d'un
tiers d'empan
[la largeur d'une coud�e et demie],
de sorte qu'elles remplissaient une longueur de trente coud�es. Du c�t� du
mur d'arri�re, o� les six solives r�unies ne faisaient que neuf coud�es, on
fit deux autres solives chacune d'une [demi-] coud�e
qu'on pla�a aux angles et qu'on orna de la m�me fa�on que les solives plus
larges. Toutes ces solives �taient garnies d'anneaux d'or sur leur face
externe, bien encastr�es comme par des racines, align�es et se correspondant
mutuellement sur tout le pourtour ; par ces anneaux passaient des barres
dor�es d'une longueur de cinq coud�es
servant � assembler les solives entre elles ; chaque barre entrait par son
extr�mit� dans la suivante comme dans une vert�bre artificielle faite en
forme de coquillage. Du c�t� du mur post�rieur se trouvait une barre unique
qui passait par toutes les solives et o� p�n�traient transversalement les
extr�mit�s des barres de chacun des deux grands c�t�s : ce qui les
assujettissait comme par des charni�res, la pi�ce m�le s'embo�tant dans la
pi�ce femelle. Tout cela maintenait le tabernacle, en l'emp�chant d'�tre agit�
par les vents ou par toute autre cause, et devait lui procurer l'immobilit� et
une stabilit� parfaite.
4.
A l'int�rieur, divisant sa longueur en trois parties, � dix coud�es du fond
il dressa quatre solives, fabriqu�es comme les autres, pos�es sur des socles
identiques, en les espa�ant un peu entre elles ; au-del� de ces solives
c'�tait le sanctuaire secret ; le reste du tabernacle �tait ouvert aux pr�tres.
Il se trouva que cette division du tabernacle imitait la nature universelle. En effet, la troisi�me
partie, en dedans des quatre solives, qui �tait inaccessible aux pr�tres,
s�ouvrait comme le ciel � Dieu ; l'espace des vingt coud�es, comme la
terre et la mer sont accessibles aux hommes, �tait de m�me accord� aux seuls
pr�tres. Mais sur le front, o� on avait fait l'entr�e, se dressaient des
solives d'or pos�es sur des socles d'argent, au nombre de cinq. On recouvrait
le tabernacle de tissus o� le byssus se m�lait � la pourpre, � l'hyacinthe
et � l��carlate. Le premier avait dix coud�es de c�t� ; il �tait
tendu devant les colonnes qui, divisant transversalement le temple, en
interdisaient l'int�rieur ; et c'est ce voile qui emp�chait que personne
p�t y jeter les regards. L'ensemble du temple s'appelait Saint, mais la partie
inaccessible en dedans des quatre solives, le Saint des Saints. Cette tenture �tait
fort belle, parsem�e des fleurs les plus diverses
que porte la terre, et portant dans son tissu tous les ornements propres �
l'embellir, � l'exception des figures d'animaux.
Une autre,toute pareille par les
dimensions, par le tissu et par la couleur, couvrait les cinq solives situ�es
� l'entr�e ; � l'angle de chaque solive un anneau la maintenait et elle
pendait du sommet jusqu'� mi-hauteur de la solive ; le reste de l'espace
livrait passage aux pr�tres qui y p�n�traient. Par dessus cette tenture, il y
en avait une autre de m�mes dimensions faite de lin, qu'on tirait � l'aide de
cordons d'un c�t� ou de l'autre ; des anneaux �taient adjoints au voile
et au cordon pour le d�ployer ou le retenir, apr�s qu'on l'aurait tir� dans
l'angle, afin qu'il n'intercept�t point la vue, surtout dans les jours
exceptionnels. Les autres jours, et principalement quand le temps �tait
neigeux, on le d�ployait et on en faisait ainsi un abri imperm�able pour le
voile de couleurs : de l� l'usage s'est maintenu, m�me quand, nous avons
construit le temple, d'�tendre ainsi un rideau devant l'entr�e. Dix autres
tentures de quatre coud�es de large et de vingt-huit coud�es de long, pourvues
de charni�res d'or,
s'adaptaient ensemble par l'insertion des gonds dans les cylindres, de fa�on �
pr�senter l'aspect d'une seule et m�me pi�ce.
Tendues ensuite par-dessus le sanctuaire, elles couvraient tout le haut ainsi
que les parois lat�rales et post�rieures jusqu'� une distance d'une coud�e
du sol. Il y avait encore d'autres tentures
d'�gale largeur, plus nombreuses d'une pi�ce que les pr�c�dentes, et d'une
longueur plus consid�rable : elles avaient, en effet, trente coud�es.
Elles �taient tiss�es de poil, mais pr�sentaient la m�me finesse de travail
que celles de laine : on les laissait pendre librement jusqu'� terre,
et aux portes elles offraient l'aspect d'un fronton et d'un portique, la onzi�me
pi�ce �tant employ�e � cet effet. D'autres pi�ces recouvraient celles-ci,
pr�par�es avec des peaux ; elles servaient d'enveloppe et de protection
aux tissus contre les ardeurs du soleil ainsi qu'en cas de pluie. On �tait tout
� fait saisi quand on les regardait de loin : leur coloration paraissait
toute semblable � celle qu'on peut voir dans le ciel. Les couvertures de poils
et de peaux descendaient �galement sur le voile tendu contre la porte pour la d�fendre
du soleil et des d�g�ts caus�s par les pluies.
5.
C'est ainsi que fut construit le tabernacle. On fit aussi pour Dieu une arche
de bois solide et incapable de se putr�fier.
Cette arche se nomme �r�n
dans notre langue. Elle �tait constitu�e de la fa�on suivante : elle
avait une longueur de cinq empans,
une largeur et une hauteur �gales de trois empans. En dedans et en dehors elle
�tait toute recouverte d'or de fa�on � masquer la boiserie ; par des
pivots
d'or un couvercle la fermait avec une merveilleuse exactitude ; il s'y
adaptait partout �galement ; nulle part aucune saillie ne blessait cette
heureuse correspondance. A chacun de ces grands c�t�s �taient fix�s deux
anneaux d'or qui traversaient tout le bois et dans ces anneaux passaient de
petites barres dor�es de chaque c�t�, pour permettre, quand il le faudrait,
de mettre l'arche en mouvement et de la d�placer - car on ne la transportait
pas � dos de b�tes, c'�taient les pr�tres qui s'en chargeaient. Sur le
couvercle se trouvaient deux figures, que les H�breux appellent Cheroubeis.
Ce sont des �tres ail�s, d'une forme telle que jamais on n'en a vu de
semblable sous le ciel. Mo�se dit qu'il les a vus sculpt�s en bas-relief sur
le tr�ne de Dieu.
C'est dans cette arche qu�il d�posa les deux tables, o� se trouvaient
consign�es les dix paroles, cinq sur chaque table
et deux et demie par colonne, et il pla�a l'arche elle-m�me dans le
sanctuaire.
6.
Dans le temple, il dressa une table pareille � celles de Delphes, de deux coud�es
de long, d'une coud�e de large et de trois empans de haut. Elle reposait sur
des pieds qui dans leur moiti� inf�rieure �taient sculpt�s, avec un art
achev�, pareils � ceux que les Doriens mettent � leurs lits ; dans la
partie sup�rieure, pr�s de la table proprement dite, on leur avait donn� une
forme quadrangulaire. Elle �tait �vid�e de chaque c�t� sur une profondeur
d'environ quatre doigts ;
un liser� courait autour de la partie sup�rieure et de la partie inf�rieure
du corps de la table. Chaque pied �tait muni d'un anneau, non loin du couvercle ;
par ces anneaux passaient des barres dor�es, int�rieurement en bois, et qu'on
pouvait retirer facilement. En effet, la partie du pied embrass�e par l'anneau
�tait creuse (?) ; les anneaux m�mes n'�taient pas tout d'une pi�ce ;
au lieu de faire un cercle complet, leurs extr�mit�s se terminaient en deux
pointes, dont l'une s'ins�rait dans le rebord sup�rieur de la table et l'autre
dans le pied. C'est par ces appareils qu'on la transportait en route. Sur cette
table, qu'on pla�ait dans le temple en la tournant vers le nord, non loin du
sanctuaire, on disposait douze pains
azymes en deux s�ries oppos�es de six, faits de farine de froment parfaitement
pure, dont on prenait deux assar�ns, mesure h�bra�que qui vaut sept
cotyles attiques.
Au-dessus des pains on posait deux coupes d'or remplies d'encens. Au bout de
sept jours, on apportait de nouveaux pains, le jour que nous appelons sabbat ;
c'est ainsi que nous appelons le septi�me jour. Quant � la raison qui fit
imaginer tout cela, nous en parlerons ailleurs.
7.
Vis-�-vis de la table, mais pr�s de la paroi tourn�e vers le midi, se
trouvait un cand�labre d'or fondu en creux du poids de cent mines, poids que
les H�breux appellent kinchares ;
ce qui, traduit en grec, r�pond � un talent. Il �tait compos� de petites sph�res
et de lis avec des grenades
et de petits crat�res ; en tout, soixante-dix objets.
Il �tait constitu� par ces objets depuis la base, qui �tait unique, jusqu'en
haut. On lui avait donn� autant de branches qu'on compte de plan�tes avec le
soleil. Il se s�parait en sept t�tes dispos�es � intervalles �gaux sur une
rang�e. Chaque t�te portait une lampe, rappelant le nombre des plan�tes ;
elles regardaient l'orient et le midi, le cand�labre �tant dispos�
obliquement.
8.
Entre ce dernier et la table, en dedans, se trouvait, comme j'ai d�j� dit, un
encensoir en bois, du m�me bois imputrescible qui les ustensiles pr�c�dents,
avec une lame de m�tal massive incrust�e tout autour. Il avait une coud�e de
large de chaque c�t� et deux coud�es de haut. Sur cet encensoir �tait dispos�
un brasier d'or, pourvu � chaque angle d'une couronne
formant un cercle d'or ; � ces couronnes s'adaptaient des anneaux et des
barres qui servaient aux pr�tres � porter l'encensoir en route. On �rigea
aussi par devant le tabernacle un autel de cuivre,
dont l'int�rieur �tait aussi en bois ; il mesurait cinq coud�es carr�es
de surface, et trois coud�es de haut ; il �tait �galement orn� d'or et
soigneusement recouvert de lames de cuivre avec un foyer pareil � un r�seau ;
c'�tait, en effet, la terre qui recevait tout le feu qui tombait du foyer,
la base ne s'�tendant pas sous toute la surface de l'autel. En face de l'autel
�taient plac�es des cruches � vin, des coupes, avec des cassolettes et des
crat�res d'or. Tous les autres objets
affect�s au service sacr� �taient faits de cuivre.
Tel �tait le tabernacle avec tous ses ustensiles.
Chapitre
VII
1.
On fit aussi des v�tements pour les pr�tres tant pour ceux qu'on appelle chaan�es
que pour le grand-pr�tre, qu'on intitule anarabaque,
ce qui signifie grand-pr�tre�
Quand le pr�tre va accomplir les rites sacr�s, apr�s avoir accompli les
purifications qu'exige la loi, il commence par rev�tir ce qu'on appelle le machanas�s.
Ce mot veut dire un v�tement �troitement ajust� ; c'est un cale�on qui
couvre les parties naturelles et qui est tiss� de fin lin ; on y introduit
les jambes comme dans des braies ; il est coup� � mi-corps et se termine
aux cuisses, autour desquelles il se serre.
2.
Par dessus, il rev�t un v�tement de lin, fait d'un double tissu
de byssus. On l'appelle ch�thom�n�,
c'est-�-dire : tissu de lin ; en effet, nous appelons le lin ch�th�n.
Ce v�tement est une tunique qui descend jusqu'aux talons ;
elle est ajust�e au corps, avec de longues manches
serr�es autour des bras ; on l'attache sur la poitrine et on l'enserre, un
peu au-dessus de l'aisselle, d'une ceinture
large d'environ quatre doigts et faite d'un tissu ajour�
qui la rait ressembler � de la peau de serpent. Des fleurs se m�lent � son
tissu, aux teintes vari�es d'�carlate, de pourpre, d'hyacinthe ;
la trame est uniquement de byssus. On commence � l'enrouler sur le sternum ;
puis apr�s un nouveau tour on la noue et elle pend encore d'une grande longueur
jusqu'aux talons, tant que le pr�tre n'a rien � faire ;
car pour l��il, c'est ainsi qu'elle pr�sente un aspect agr�able. Mais quand
il lui faut vaquer aux sacrifices et faire son service, pour n'�tre pas g�n�
dans ses op�rations par les mouvements de l'�toffe, il la rejette en haut et
la porte sur l'�paule gauche. Mo�se lui a donn� le nom d'abaneth ;
nous, les Babyloniens nous ont appris � la nommer �mian,
car c�est ainsi qu'on la d�signe chez eux. Cette tunique ne fait de plis
nulle part ; elle pr�sente une large ouverture � l'endroit du cou ;
� l'aide de cordonnets pendant du bord du v�tement du c�t� de la poitrine et
du c�t� du dos, on l'attache au-dessus de chaque �paule. Elle s'appelle mazabazan�s.
3.
Sur sa t�te, le pr�tre porte une calotte sans pointe et qui ne couvre pas la t�te
tout enti�re, mais se pose un peu au-dessus de sa partie m�diane. Son nom est masanaemphth�s ;
elle est arrang�e de fa�on � ressembler � une couronne, consistant en un �pais
ruban fait d'un tissu de lin ;
car elle est repli�e sur elle-m�me et cousue
plusieurs fois. Ensuite un tissu vient par en haut recouvrir la calotte en
descendant jusqu'au front ; il cache la couture du ruban et tout ce qu'il
pr�sente de disgracieux et entoure tout le cr�ne d'une �toffe unie. On
l'ajustait avec soin, de crainte qu'il ne roul�t � terre pendant que le pr�tre
s'occupait du service sacr�.
4.
Nous venons de montrer comment s'habille le commun des pr�tres.
Quant au grand-pr�tre, il se pare de la m�me fa�on, sans rien omettre de ce
qui vient d'�tre dit, mais il rev�t, en outre, une tunique faite d'hyacinthe.
Elle descend �galement jusqu'aux pieds : on l'appelle m�eir
dans notre langue ; elle est enserr�e par une ceinture orn�e des m�mes
teintes vari�es qui fleurissaient la pr�c�dente, avec de l'or m�l� � son
tissu. A son bord inf�rieur sont cousues des franges qui pendent et rappellent
par leur couleur les grenades, et des clochettes d'or arrang�es avec un vif
souci de l'harmonie, de fa�on � ins�rer entre deux clochettes une grenade et
entre deux grenades une clochette. Mais cette tunique n'est pas compos�e de
deux pi�ces qui seraient cousues sur les �paules et sur les c�t�s ;
c'est un seul morceau, d'un long tissu qui pr�sente une ouverture pour le cou,
non pas transversale, mais fendue dans le sens de la longueur depuis le sternum
jusqu'au milieu de l'espace situ� entre les deux �paules. Une frange y est
cousue pour qu'on ne s'aper�oive pas de ce que la fente � de disgracieux. Il y
a �galement des ouvertures par o� passent les mains.
5.
Par-dessus ces v�tements, il en rev�t un troisi�me, celui qu'on appelle �phoud�s ;
il ressemble � l'�p�mis des Grecs. Il est fait de la fa�on suivante. Tiss�
sur une longueur d'une coud�e, de couleurs vari�es et brod� aussi d'or, il
laisse � d�couvert le milieu de la poitrine ; il est pourvu de manches et
pr�sente toute l'apparence d'une tunique.
Dans la lacune de ce v�tement s'ins�re un morceau de la largeur d'une palme,
tout brod� d'or et des m�mes couleurs que l'�phoud�s.
Il s'appelle ess�n,
mot qui se traduirait en grec par logion
(oracle). Il remplit exactement la place qu'on a laiss�e vide dans le tissu �
l'endroit de la poitrine. Il s'y unit, gr�ce a des anneaux d'or qu'il porte �
chaque angle, � des anneaux pareils de l'�phoud�s qui leur correspondent, un
fil d'hyacinthe passant dans ces anneaux pour les relier ensemble. Et pour qu'on
ne v�t pas de jour entre ces anneaux, on imagina d'y coudre un galon
d'hyacinthe. Deux sardoines
agrafent l'�p�mis sur les �paules, car elles ont de part et d'autre des extr�mit�s
en or qui s��talent et font office de crochets. Sur ces pierres sont grav�s
les noms des fils de Jacob dans notre langue et en caract�res indig�nes, six
sur chaque pierre ; les noms des plus �g�s
sont sur l'�paule droite - sur l'ess�n se trouvent aussi des pierres au nombre
de douze, d'une grandeur et d'un
�clat extraordinaires, parure que les hommes ne pourraient se procurer � cause
de sa valeur �norme. Ces pierres donc sont rang�es trois par trois sur quatre
lignes et ins�r�es dans le tissu. Autour de ces pierres s'enroulent des fils
d'or, qui font partie du tissu, et dispos�s de mani�re � les emp�cher de s'�chapper.
La premi�re triade comprend une sardoine, une topaze, une �meraude ; la
seconde pr�sente une escarboucle, un jaspe, un saphir ; la troisi�me a
d'abord un morceau d'ambre, puis une am�thyste, et, en troisi�me lieu, une
agate, la neuvi�me pierre de l'ensemble ; dans la quatri�me rang�e est
dispos�e d'abord une chrysolithe, apr�s cela un onyx, puis un b�ryl pour
finir.
Sur toutes ces pierres sont grav�es des lettres composant les noms des fils de
Jacob, que nous consid�rons comme des phylarques, chaque pierre �tant d�cor�e
d'un de ces noms, selon l'ordre m�me de leur naissance respective.
Comme les anneaux sont trop faibles par eux-m�mes pour supporter le poids des
pierres, on mit deux autres anneaux plus grands au bord de l'ess�n le plus
rapproch� du cou, en les ins�rant dans le tissu et en les disposant de mani�re
� recevoir des cha�nes travaill�es qui se rejoignent sur le haut des �paules
et s'adaptent l'une � l'autre gr�ce � des ligaments d'or entrelac�s. L'extr�mit�
de ces cha�nes, ramen�e en sens inverse, allait se fixer dans l'anneau sup�rieur
de la lisi�re dorsale de l'�phoud�s, ce qui garantissait l'ess�n de toute
chute. A l'ess�n �tait cousue une ceinture
garnie des m�mes ornements de couleur m�l�s d'or dont j'ai d�j� parl� ;
cette ceinture, apr�s avoir fait un tour, revenait se nouer par-dessus la
couture, puis retombait et pendait. Quant aux franges, des �tuis d'or
les recevaient � chaque extr�mit� de la ceinture et les tenaient toutes
enferm�es.
6.
Comme coiffure, le grand-pr�tre avait d'abord un bonnet fait de la m�me fa�on
que celui de tous les pr�tres ; mais, par dessus, s'en trouvait cousu un
second de couleur d'hyacinthe ;
une couronne d'or l'entourait, compos�e de trois cercles ; sur cette
couronne fleurissait un calice d'or rappelant la plante que nous appelons chez
nous saccharon,
mais que les Grecs vers�s dans l'art de cueillir les simples appellent
jusquiame. S'il y a des personnes qui tout en ayant vu cette plante, ignorant
son nom, n'en connaissent pas la nature, ou bien, tout en sachant son nom, ne la
connaissent pas de vue, pour celles-l� je m'en vais la d�crire. C'est une
plante dont la hauteur d�passe souvent trois palmes, et qui ressemble par sa
racine au navet - on pourrait sans inexactitude risquer cette comparaison, - et
par ses feuilles � la roquette.
Du milieu de ses branches elle �met un calice qui tient fortement au rameau ;
une enveloppe le recouvre qui se d�tache d'elle-m�me quand il commence � se
transformer en fruit. Ce calice est grand comme une phalange du petit doigt et
ressemble par son contour � un crat�re. J'indique ceci �galement pour ceux
qui ne l'ont pas appris : il pr�sente dans sa partie inf�rieure la moiti�
d'une balle qui serait divis�e en deux, car il est arrondi d�s la racine,
puis, apr�s s'�tre un peu r�tr�ci par une l�g�re courbe rentrante d'une
forme gracieuse, il s'�largit de nouveau insensiblement en s�pales fendus
comme l'ombilic d'une grenade. De plus, un opercule h�misph�rique le recouvre,
qu'on dirait soigneusement fait au tour et que surmontent les s�pales d�coup�s
qui, je l'ai dit, se d�veloppent comme dans la grenade, garnis d'�pines, aux
extr�mit�s, finissant tout � fait en pointe. La plante conserve sous cet
opercule ses fruits, qui remplissent toute l'�tendue du calice, fruits pareils
� la semence de la plante dite sid�rite, et elle produit une fleur qui parait
comparable aux feuilles claquantes du pavot. C'est sur le mod�le de cette
plante qu�on garnit la couronne qui va de la nuque aux deux tempes ;
quant au front, l'�phi�lis ne le couvrait pas (c'est le nom qu'on peut donner
au calice) ; il y avait l� une lame d'or
qui portait grav� en caract�res sacr�s le nom de Dieu.
7.
Telle �tait la parure du grand-pr�tre. On peut trouver surprenante la haine
que les hommes ont pour nous et qu'ils ne cessent de nous t�moigner sous pr�texte
que nous m�prisons la divinit�, qu'eux-m�mes se flattent de r�v�rer :
car si on r�fl�chit � la construction du tabernacle et qu'on regarde les v�tements
du pr�tre et les ustensiles dont nous nous servons pour le minist�re sacr�,
on d�couvrira que notre l�gislateur �tait un homme divin et que ce sont de
vaines calomnies dont nous sommes l'objet. En effet, la raison d'�tre de chacun
de ces objets, c'est de rappeler et de figurer l'univers,
comme on le verra si l'on consent � examiner sans haine et avec discernement.
Ainsi pour le tabernacle, qui a trente coud�es de long, en le divisant en trois
parties et en en abandonnant deux aux pr�tres comme un lieu accessible � tous,
Mo�se repr�sente la terre et la mer, lesquelles sont, en effet, accessibles �
tous ; mais la troisi�me partie, il l'a r�serv�e � Dieu seul, parce que
le ciel aussi est inaccessible aux hommes. En mettant sur la table les douze
pains, il rappelle que l'ann�e se divise en autant de mois. En faisant un cand�labre
compos� de soixante-dix parties, il rappelle les dix degr�s des plan�tes, et
par les sept lampes qu'il porte les plan�tes elle-m�mes ;
car tel est leur nombre. Les voiles tiss�s des quatre esp�ces symbolisent les
�l�ments naturels : ainsi le byssus para�t d�signer la terre, puisque
c'est d'elle que na�t le lin ; la pourpre d�signe la mer, parce qu'elle
est rougie du sang des poissons ; l'air doit �tre d�sign� par
l'hyacinthe, et l'�carlate serait le symbole du feu. Mais la tunique du
grand-pr�tre,
faite de lin, d�signe �galement la terre et l'hyacinthe le ciel ; elle
ressemble aux �clairs par ses grenades, et au tonnerre par le bruit de ses
clochettes. Et l'�phaptis
repr�sente la nature universelle, parce que Dieu a voulu qu'elle f�t faite de
quatre substances ; elle est, de plus, tiss�e d'or, par allusion,
j�imagine, � la lumi�re du soleil qui s'ajoute � tous les objets. L'ess�n
a �t� dispos� au milieu de l'�phaptis � la mani�re de la terre, laquelle,
en effet, se trouve � l'endroit le plus central. La ceinture qui en fait le
tour repr�sente l'oc�an ; car celui-ci environne tout �troitement. Le
soleil et la lune sont figur�s par les deux sardoines au moyen desquelles Mo�se
agrafe le v�tement du grand-pr�tre. Quant aux douze pierres, qu'on veuille y
voir les mois, ou bien les constellations qui sont en m�me nombre, - ce que les
Grecs appellent le cercle du zodiaque -, on ne se m�prendra pas sur ses
intentions. Enfin, le hutinet d'hyacinthe me parait repr�senter le ciel, -
autrement on n'aurait pas mis sur lui le nom de Dieu -, ce bonnet d�cor� d'une
couronne, et m�me d'une couronne d'or � cause de sa couleur �clatante, qui
pla�t particuli�rement � la divinit�.
Qu'il me suffise d'avoir donn� ces indications, car mon sujet me fournira
encore souvent l'occasion de m'�tendre longuement sur les m�rites du l�gislateur.
Chapitre
VIII
1.
Lorsque le tabernacle dont il vient d'�tre parl� fut achev�, avant que les
offrandes fussent consacr�es, Dieu, apparaissant � Mo�se, lui prescrivit de
conf�rer le sacerdoce � son fr�re Aaron, l'homme que ses vertus rendaient le
plus digne de tous d'obtenir cette charge. Alors, r�unissant le peuple en
assembl�e, il leur expose ses m�rites et sa bont� ainsi que les dangers qu'il
avait courus dans leur int�r�t. Et comme eux t�moignaient que tout cela �tait
vrai et faisaient para�tre leur vive sympathie pour lui : � Isra�lites,
leur dit-il, voici que l��uvre s'ach�ve, telle qu'elle a plu � Dieu lui-m�me,
et telle que nous avons pu l'accomplir. Mais comme il faut recevoir Dieu dans le
tabernacle, quelqu'un nous est n�cessaire au pr�alable pour faire fonctions de
pr�tre, pour s'acquitter des sacrifices et des pri�res en notre faveur. Et
pour moi, si le soin d'en d�cider me revenait, je croirais m�riter moi-m�me
cette charge,
d'abord parce que chacun � naturellement de l'amour-propre, ensuite parce que
j'ai conscience de m'�tre donn� beaucoup de mal pour votre salut. Mais enfin,
Dieu lui-m�me a jug� qu'Aaron m�ritait cette dignit� et c'est lui qu'il a
choisi pour pr�tre, sachant qu'il est le
plus juste d'entre nous. Ainsi c'est lui qui rev�tira la robe consacr�e �
Dieu, qui aura � s'occuper des autels et � veiller aux sacrifices, qui
adressera des pri�res en votre faveur � Dieu qui les agr�era, parce qu'il a
souci de votre race et que, venant d'un homme qu'il a �lu lui-m�me, il ne peut
que les exaucer.
Les H�breux furent satisfaits de ces paroles et acquiesc�rent au choix divin.
Car Aaron, � cause de sa famille, du don proph�tique et des vertus de son fr�re,
�tait le plus qualifi� de tous pour cette dignit�. Il avait quatre fils
en ce temps-l� : Nabad(os), Abious,
El�azar(os), Itamar(os).
2.
Tout l'exc�dent
des mat�riaux affect�s � la pr�paration du tabernacle, il ordonna de
l'utiliser � faire des tentures protectrices pour le tabernacle lui-m�me, pour
le cand�labre, l'autel des parfums et les autres ustensiles, afin qu'en voyage
ils ne subissent aucun dommage soit du fait de la pluie, soit par la poussi�re
qu'on remuerait. Et apr�s avoir r�uni � nouveau le peuple, il leur imposa une
contribution qui se monterait � un
demi-sicle par t�te : le sicle, monnaie des H�breux, �quivaut � quatre
drachmes attiques.
Ceux-ci ob�irent avec empressement aux ordres de Mo�se, et le nombre des
contribuables fut de 605.550.
Apportaient l'argent tous les hommes libres �g�s de vingt ans et au-del�
jusqu'� cinquante, et tout ce qu'on r�unit �tait d�pens� pour les besoins
du tabernacle.
3.
Il purifia le tabernacle et les pr�tres, et voici comment il proc�da � leur
purification. Il fit broyer et p�trir 500 sicles de myrrhe choisie, autant
d'iris et la moiti� de ce poids de cinname et de calame
(c'est aussi une esp�ce de parfum), et, apr�s les avoir m�lang�s et amollis
par la cuisson avec un h��n d'huile d'olives, mesure de notre pays qui
contient deux conges attiques, fit pr�parer selon l'art des parfums un onguent
d'une suave odeur. Puis, l'ayant pris, il en oignit les pr�tres en personne et
tout le tabernacle et les mit en �tat de puret� ; et les parfums - il y
en avait beaucoup et de toutes sortes - on les porta dans le tabernacle sur
l'encensoir d'or, car ils avaient une grande valeur. Je me dispense d'exposer
quelle �tait la nature de ces parfums, de crainte de fatiguer mes lecteurs.
Deux fois par jour, avant le lever du soleil et � l'heure du coucher, on devait
faire des fumigations et garder de l'huile purifi�e pour les lampes, en faire
luire trois sur le cand�labre sacr� devant Dieu durant tout le jour et
n'allumer les autres que vers le soir.
4.
Tout d�s lors �tant achev�, les artisans qui parurent les plus excellents
furent B�s�l��l et Eliab. Car aux inventions d�j� connues ils s'ing�ni�rent
� en ajouter encore de meilleures et ils se montr�rent tr�s capables
d'imaginer ce qu'on ne savait pas fabriquer pr�c�demment. Mais des deux, c'est
B�s�l��l qui fut estim� le plus habile. On ne mit en tout � l'ouvrage que
sept mois ;
ce temps �coul�, la premi�re ann�e depuis leur d�part d'�gypte se trouva
achev�e. Ce fut au d�but de la deuxi�me ann�e,
au mois de Xanthicos d'apr�s les Mac�doniens et de Nisan chez les H�breux, et
� la n�om�nie, que l'on consacra le tabernacle et tous ses ustensiles que
j'ai d�crits.
5.
Dieu fit voir qu'il �tait satisfait de l��uvre des H�breux et, loin de
rendre leur travail vain en d�daignant d'en faire usage,
il consentit � p�n�trer dans ce sanctuaire et � y habiter. Il y annon�a sa
pr�sence comme il suit.
Tandis que le ciel �tait serein, au-dessus du tabernacle l'obscurit� se fit,
une nu�e l'entoura qui n'�tait ni assez profonde ni assez dense pour qu'on se
cr�t en hiver, ni cependant assez l�g�re pour que la vue e�t le pouvoir de
rien percevoir au travers ; une ros�e d�licieuse en d�gouttait
attestant la pr�sence de Dieu pour ceux qui le voulaient et y croyaient.
6.
Mo�se, apr�s avoir gratifi� de r�compenses m�rit�es les artisans qui
avaient ex�cut� ces travaux, sacrifia dans le vestibule du tabernacle, selon
les prescriptions de Dieu, un taureau, un b�lier, et bouc pour les p�ch�s.
D'ailleurs, je me propose de dire, quand j'en serai aux sacrifices, les rites
sacr�s qui entourent leur accomplissement, j'y indiquerai ceux que la Loi
ordonne de br�ler en holocaustes et ceux dont elle permet de pr�lever des
parties pour les consommer. Puis, avec le sang des victimes, il aspergea les v�tements
d'Aaron et Aaron lui-m�me avec ses fils, en les purifiant avec de l'eau de
Source et du parfum liquide afin de les donner � Dieu. Pendant sept jours donc,
il s'occupa d'eux et de leurs costumes ainsi que du tabernacle et de ses
ustensiles, en faisant d'abord des fumigations d'huile comme je l'ai d�j� dit,
avec le sang des taureaux et des b�liers dont on immolait chaque jour un de
chaque esp�ce ; le huiti�me jour, il annon�a une f�te pour le peuple et
prescrivit qu'on offrit des sacrifices, chacun selon ses moyens. Les H�breux,
luttant de z�le et jaloux de se surpasser mutuellement par le nombre de leurs
sacrifices respectifs, ob�irent � ces instructions. Et quand les victimes
furent d�pos�es sur l'autel, un feu soudain en sortit,
br�lant spontan�ment, et, pareil par sa flamme � la lueur d'un �clair, il
consuma tout ce qui se trouvait sur l'autel.
7.
Mais ce fut cause aussi d'un malheur pour Aaron, pour l'homme et pour le p�re,
malheur d'ailleurs vaillamment support� par lui, car il avait l'�me affermie
contre les accidents et il pensait que c'�tait par la volont� de Dieu que ce d�sastre
lui arrivait. Deux d'entre ses fils, qui �taient au nombre de quatre, comme
j'ai d�j� dit, les plus �g�s, Nabad et Abious, ayant apport� sur l'autel
non les parfums qu'avaient prescrits Mo�se, mais ceux dont ils s��taient
servis ant�rieurement, furent compl�tement br�l�s, le feu s'�tant �lanc�
sur eux et s'�tant mis � consumer leur poitrine et leur visage, sans que
personne p�t l'�teindre. C'est ainsi qu'ils moururent. Mo�se ordonne � leur
p�re et � leurs fr�res de soulever leurs corps,
de les emporter hors du campement et de les ensevelir en grande pompe. Le peuple
les pleura, p�niblement affect� par une mort survenue d'une fa�on si �trange.
Mo�se estima que seuls les fr�res et le p�re devaient s'abstenir de songer au
chagrin de cette perte, en se souciant plus de rendre hommage � Dieu que de
prendre une attitude d�sol�e � cause de ces morts. D�j�, en effet, Aaron �tait
rev�tu des v�tements sacerdotaux.
8.
Mo�se, ayant d�clin� tous les honneurs qu'il voyait le peuple dispos� � lui
conf�rer, ne se consacra plus qu'au service de Dieu. Il avait cess� maintenant
ses ascensions au Sina�, mais, p�n�trant dans le tabernacle, il y recevait r�ponse
de ce qu'il demandait � Dieu. Il semblait un homme ordinaire par sa mise, et
dans tout le reste il se donnait l'air de quelqu'un du commun ; il ne
voulait pas que rien p�t le distinguer de la foule, si ce n'est le seul souci
de leur appara�tre comme une providence. Au surplus, il �crivit une
constitution et des lois, selon lesquelles ils m�neraient une vie agr�able �
Dieu, sans avoir rien � se reprocher les uns aux autres. Il organisa tout cela
sous l'inspiration de Dieu.
Je vais m �tendre maintenant sur la constitution et les lois.
9.
Toutefois je veux rappeler d'abord un d�tail que j'avais laiss� de c�t�
touchant les v�tements du grand-pr�tre. Mo�se ne laissait aux coupables man�uvres
des imposteurs aucune occasion de s'exercer, au cas o� il y aurait eu des gens
capables d'abuser de l'autorit� divine, car il laissait Dieu absolument ma�tre
de pr�sider aux sacrifices, quand il lui plaisait, ou de n'y pas assister. Et
ce point, il a voulu qu'il appar�t clairement non seulement aux Isra�lites,
mais encore � tous les �trangers qui pourraient se trouver parmi eux. De ces
pierres, en effet, que j'ai dit pr�c�demment que le grand-pr�tre portait sur
ses �paules, - c'�taient des sardoines, et je crois superflu d'en indiquer les
propri�t�s, qui sont parvenues � la connaissance de tout le monde -, il
arrivait, lorsque Dieu assistait aux c�r�monies sacr�es, que celle qui
servait d'agrafe sur l'�paule droite se mettait � briller,
car une lumi�re en jaillissait, visible aux plus �loign�s, et qui auparavant
n'appartenait nullement � la pierre. Ce seul fait doit sembler merveilleux �
ceux qui ne font pas les sages en d�criant les choses divines. Mais voici qui
est plus merveilleux encore : c'est qu'au moyen des douze pierres, que le
grand-pr�tre portait sur la poitrine ins�r�es dans la trame de l'ess�n, Dieu
annon�ait la victoire � ceux qui se disposaient � combattre. En effet, une
telle lumi�re s�en �chappait, tant que l'arm�e ne s'�tait pas �branl�e,
qu'il �tait constant pour tout le peuple que Dieu �tait l� pour les secourir.
De l� vient que ceux des Grecs qui v�n�rent nos usages parce qu'ils n'ont
rien � leur opposer appellent l'ess�n logion (oracle). Mais ess�n et
sardoine ont cess� de briller deux cents ans avant que je composasse cet �crit,
parce que Dieu s'est irrit� de la transgression des lois. Mais nous aurons
meilleure occasion d'en parler : pour l'instant je reviens � la suite de
mon r�cit.
10.
Lorsque le tabernacle fut enfin consacr� et qu'on eut bien pr�par� tout ce
qui concernait les pr�tres, le peuple se persuada que Dieu habitait avec lui
dans la tente et se disposa � offrir des sacrifices et � se donner rel�che,
comme s�il avait �cart� d�sormais toute perspective de malheur, prenant bon
courage � l'�gard d'un avenir qui s'annon�ait favorable ; et dans chaque
tribu on offrit des dons tant publics que priv�s � Dieu. Ainsi les phylarques
s'en viennent par deux offrir un char et deux b�ufs, - ce qui faisait en tout
six chars, lesquels transportaient
le tabernacle dans les marches. En outre, chacun apporte pour son compte un
gobelet, un plat et une cassolette,
cette derni�re d'une valeur de dix dariques
et remplie de parfums. Quant au plat et �
la coupe, qui �tait en argent, les deux r�unis pesaient 200 sicles ; mais
pour la coupe on n'en avait employ� que 70. Ils �taient pleins de farine de
froment p�trie dans l'huile, de celle dont on se sert sur l'autel pour les
sacrifices. Plus un veau et un b�lier, avec un agneau �g� d'un an, destin�s
� �tre br�l�s enti�rement, et, en outre, un chevreau pour demander pardon
des p�ch�s. Chacun des chefs offrait encore d'autres sacrifices dits de pr�servation, chaque jour deux b�ufs
et cinq b�liers et autant
d'agneaux d'un an et de boucs.
C'est ainsi qu'ils sacrifient pendant douze jours, chacun son jour complet.
Quant � Mo�se, qui avait cess� de gravir le Sina� et qui entrait dans le
tabernacle,
il s'y renseignait aupr�s de Dieu sur ce qu'il fallait faire et sur la r�daction
des lois. Ces lois, trop excellentes pour �tre l��uvre de la sagesse
humaine, ont �t� observ�es strictement � toute �poque parce qu'on estimait
qu'elles �taient un don de Dieu, si bien que, ni en temps de paix, par
mollesse, ni en temps de guerre, par contrainte, les H�breux n'ont transgress�
une seule de ces lois. Mais je cesse de parler sur ce sujet, ayant r�solu de
composer un autre livre sur les lois.
Chapitre
IX
1.
Pour le moment, je vais en mentionner quelques-unes relatives aux purifications
et aux sacrifices ;
puisque aussi bien c'est de sacrifices que j'ai �t� amen� � parler. Il y a
deux sortes de sacrifices : les uns se font par les particuliers, les
autres par le peuple, et ils ont lieu selon
deux modes.
Dans les premiers, toute la b�te offerte est br�l�e en holocauste ; de l�
vient justement le nom qu'ils ont pris. Les autres sont des sacrifices d'actions
de gr�ce ; ils sont destin�s � fournir un festin � ceux qui les
offrent. Je vais parler de la premi�re cat�gorie. Un simple particulier qui
offre un holocauste
immole un b�uf, un agneau et un bouc, ces derniers �g�s d'un an ; les b�ufs,
on peut les immoler m�me plus �g�s. Mais tous ces holocaustes doivent �tre
d'animaux m�les.
D�s qu'ils sont �gorg�s,
les pr�tres aspergent de sang le pourtour de l'autel,
puis, apr�s les avoir nettoy�s,
ils les d�membrent, y r�pandent du sel
et les d�posent sur l'autel, qu'on a au pr�alable rempli de bois et allum�.
Ils y mettent les pieds des victimes et les parties abdominales soigneusement
nettoy�es avec les autres parties pour y �tre consum�s ; les peaux sont
prises par les pr�tres.
Tel est le mode d'offrande des holocaustes.
2.
Si l'on a des sacrifices d'actions de gr�ce � offrir, ce sont les m�mes b�tes
qu'on immole, mais il faut qu'elles soient sans d�faut, �g�es de plus d'un
an, m�les et femelles ensemble. Apr�s qu'on les a immol�es, on teint l'autel
de leur sang ; les reins, la membrane qui couvre les intestins et toutes
les graisses avec le lobe du foie, ainsi que la queue de l'agneau, sont dispos�s
sur l�autel. Mais la poitrine et la jambe droite sont offertes aux pr�tres et
on c�l�bre des festins pendant deux jours avec le reste des chairs ; et,
s'il en subsiste apr�s, on le br�le.
3.
On sacrifie aussi pour les p�ch�s,
et le mode est le m�me que pour les sacrifices d'actions de gr�ce. Ceux qui
sont dans l'impossibilit� d'offrir des victimes sans d�faut donnent deux
colombes ou deux tourterelles, dont l'une est consacr�e en holocauste � Dieu
et dont l'autre est donn�e en
nourriture aux pr�tres. Mais je traiterai avec plus d'exactitude de
l'immolation de ces animaux quand je parlerai des sacrifices. Celui
qui est induit au p�ch� par ignorance
offre un agneau et une ch�vre du m�me �ge, et le pr�tre arrose l'autel avec
le sang, non pas comme pr�c�demment, mais aux extr�mit�s des angles.
Les reins, toute la graisse avec le lobe du foie, on les d�pose sur l'autel.
Les pr�tres prennent pour eux les peaux et les viandes, qu'ils consommeront le
jour m�me dans le sanctuaire ; car la loi ne permet pas d'en laisser
jusqu'au lendemain. Celui qui a commis une faute et qui en a conscience,
sans qu'il y ait personne pour l'accuser, immole un b�lier ; ainsi
l�exige la loi. Les pr�tres en consomment �galement les chairs dans le
sanctuaire le jour m�me. Les chefs
qui sacrifient pour leurs p�ch�s apportent les m�mes victimes que les
particuliers, mais ils s'en distinguent en ce qu'ils offrent en plus un taureau
et un bouc m�les.
4.
La loi veut que dans tous les sacrifices priv�s et publics on offre de la
farine de froment parfaitement pure,
la mesure d'un assar�n pour un agneau, de deux pour un b�lier et de
trois pour un taureau. On br�le sur l'autel cette farine
p�trie dans l'huile. Car ceux qui font un sacrifice apportent �galement de
l'huile, pour un b�uf un demi-h��n, pour un b�lier, le tiers de cette
mesure, et un quart pour un agneau. Le h��n est une antique mesure des H�breux,
de la capacit� de deux conges attiques. On offrait la m�me mesure d'huile et
de vin ; on versait ce vin en libations autour de l'autel. Si quelqu'un,
sans faire de sacrifice, offrait en v�u de la fleur de farine,
il en pr�levait d'abord une poign�e, qu'il r�pandait sur l�autel ; le
reste, c'�taient les pr�tres qui le prenaient pour le consommer, soit bouilli,
car on le p�trissait dans de l'huile, soit � l'�tat de pains. Mais quand le
pr�tre l'offrait,
quelle qu'en f�t la quantit�, elle devait �tre enti�rement br�l�e.
La loi d�fend
d'immoler le m�me jour et au m�me endroit une b�te avec celle qui l'a engendr�e,
ni, d'une fa�on g�n�rale, avant que huit jours se soient �coul�s depuis la
naissance, il se fait encore d'autres sacrifices pour se pr�server de maladies
ou pour d'autres raisons. Dans ces sacrifices on offre des p�tisseries avec les
victimes ; selon la loi, on n'en doit rien laisser jusqu'au lendemain, et
les pr�tres en pr�l�vent une part pour eux.
Chapitre
X
1.
La loi veut qu'aux frais publics
on immole chaque jour des agneaux du m�me �ge au commencement et � la fin du
jour ;
mais le septi�me jour, qui s'appelle sabbata, on en �gorge deux �
chaque sacrifice, le sacrifice se faisant, d'ailleurs, de la m�me fa�on. A la
n�om�nie, outre les sacrifices quotidiens, on offre encore deux b�ufs avec
sept agneaux �g�s d'un an et un b�lier, plus un bouc pour le pardon des p�ch�s,
au cas o� on aurait p�ch� par oubli.
2.
Le septi�me mois, que les Mac�doniens appellent Hyperb�r�t�e,
outre ce qui vient d'�tre dit, on immole encore un taureau, un b�lier et sept
agneaux, plus un bouc pour les p�ch�s.
3.
Le dix du m�me mois lunaire, on je�ne jusqu'au soir et on
immole ce jour-l� un taureau, deux b�liers,
sept agneaux et un bouc pour les p�ch�s. On offre, en outre, deux boucs, dont
l'un est envoy� vivant hors du pays vers le d�sert et � pour but de d�tourner
et d'expier les p�ch�s du peuple tout entier ; l'autre, on l'am�ne
devant la ville, dans un endroit parfaitement pur, et l� on le br�le avec la
peau elle-m�me, sans rien nettoyer du tout. On br�le en m�me temps un taureau
qui n'est pas offert par le peuple, mais qui est donn� � ses frais
par le grand-pr�tre. Une fois ce taureau �gorg�, apr�s avoir introduit dans
le sanctuaire de son sang ainsi que du sang du bouc, il en asperge sept fois
de son doigt le plafond ainsi que le plancher, et autant de fois encore le
sanctuaire m�me et les alentours de l'autel d'or ;
le reste, il l'apporte et le r�pand dans le vestibule. En outre, on d�pose sur
l'autel les extr�mit�s, les reins, la graisse avec le lobe du foie.
Et le grand-pr�tre offre encore pour son compte un b�lier en holocauste �
Dieu,
4.
Le quinze du m�me mois, comme la saison s'acheminait d�sormais vers l'hiver,
Mo�se ordonne qu'on construise des tentes
dans chaque famille afin de se mettre en garde et de se prot�ger contre le
froid de l'ann�e. Et lorsqu'ils auront leur patrie, une fois parvenus dans
cette ville qu'ils tiendront pour m�tropole � cause du temple, pendant huit
jours ils c�l�breront une f�te, et offriront alors des holocaustes et des
sacrifices de reconnaissance � Dieu, en portant dans leurs mains un bouquet de
myrte et de saule avec une
branche de palmier et le fruit de la pers�a.
Ils devront, le premier jour,
sacrifier comme holocaustes treize b�ufs, autant d'agneaux plus un, et deux b�liers
avec un bouc en sus pour le pardon des p�ch�s. Pour les jours suivants, on
sacrifie le m�me nombre d'agneaux et de b�liers avec un bouc, en retranchant
chaque jour un b�uf de fa�on � arriver � sept. On s'abstient de tout travail
le huiti�me jour, et l'on sacrifie � Dieu, comme nous l'avons d�j� dit, un
veau, un b�lier, sept agneaux et un bouc pour le pardon des p�ch�s. Tels sont
les usages, consacr�s par les anc�tres, que les H�breux observent pour la f�te
des tentes.
5.
Au mois de Xanthicos, qui s'appelle chez nous Nisan et qui commence l'ann�e, le
quatorzi�me jour en comptant d'apr�s la lune, quand le soleil est au B�lier,
- car c'est en ce mois que nous avons �t� d�livr�s de l'esclavage des �gyptiens
-, il a institu� qu'on devait
chaque ann�e offrir le m�me sacrifice que j'ai dit que nous avions offert
jadis au sortir de l'�gypte, sacrifice dit Pascha. Nous l'accomplissons
par phratries ; rien des chairs
sacrifi�es n'est gard� pour le lendemain.
Le quinze, la f�te des azymes fait suite
� la P�que, f�te de sept jours
pendant laquelle on se nourrit d�azymes, et chaque jour on �gorge deux
taureaux, un b�lier et sept agneaux. Tout cela s'offre en holocauste et on y
ajoute encore un bouc pour les p�ch�s, qui sert chaque jour au repas des pr�tres.
Le deuxi�me jour
des azymes, c'est-�-dire le seize, on prend -. une partie des fruits qu'on a r�colt�s,
auxquels on n'a pas encore touch�,
et estimant qu'il est juste d'en faire hommage d'abord � Dieu � qui l'on doit
la production de ce fruits, on lui offre les pr�mices de l'orge
de la fa�on suivante. Faisant griller une poign�e d��pis qu'on broie, puis
purifiant les grains d'orge pour les moudre, on en apporte pour Dieu un assar�n
sur l'autel, et apr�s on avoir jet� une poign�e unique sur l'autel, on
abandonne le reste � l'usage des pr�tres. D�s lors, il est loisible � tout
le monde soit publiquement, soit individuellement de faire la r�colte.
On offre aussi, outre les pr�mices des produits du sol, un agnelet en
holocauste � Dieu.
6.
Quand la septi�me semaine qui suit ce sacrifice est pass�e, - toutes ces
semaines font quarante-neuf jours -, le cinquanti�me jour, que les h�breux
appellent Asartha - ce mot d�signe la
Pentec�te -, on offre � Dieu un pain compos� de deux assar�ns de farine de
froment m�lang�s de levain et, comme sacrifice, deux agneaux. Tout cela,
offert selon la loi � Dieu, est destin� uniquement au repas des pr�tres et il
n'est pas permis d'en rien laisser pour le lendemain.
On immole aussi comme holocaustes trois veaux, deux b�liers, quatorze agneaux
et deux boucs pour les p�ch�s.
Il n'est pas de f�te o� l'on n'offre d'holocaustes et o� l'on ne donne de rel�che
aux fatigues du travail ; dans chacune la loi prescrit un genre de
sacrifice et un repos exempt de toute peine, et c'est en vue de c�l�brer des
festins qu'on fait ces sacrifices.
7.
C'est le peuple qui fournit le pain cuit sans levain ; on y emploie
vingt-quatre assar�ns. On les cuit deux par deux en les s�parant la veille du
sabbat ; le sabbat, au matin, on les apporte et on les pose sur la table
sacr�e en deux s�ries oppos�es de six pains. Et, apr�s qu'on a en plac�
par-dessus deux planchettes charg�es d'encens, ils y demeurent jusqu'au sabbat
suivant. Alors � leur place on en apporte d'autres ; les premiers sont
donn�s aux pr�tres pour leur nourriture, tandis qu'on fait fumer l�encens
sur le feu sacr� dont on se sert pour tous les holocaustes et l'on met � sa
place d'autre encens au-dessus des pains. Le pr�tre offre � ses propres frais,
et il le fait deux fois par jour, de la farine p�trie dans de l'huile et durcie
par une courte cuisson ;
il y entre un assar�n de farine dont une moiti� est mise sur le feu le matin
et l'autre vers le soir. Mais nous avons encore � nous expliquer sur ce sujet
avec plus de d�tails : je crois que, pour le moment, ce que j'en ai d�j� dit
peut suffire.
Chapitre
XI
1.
Mo�se, apr�s avoir s�par� la tribu de L�vi de la communaut� du peuple,
pour en faire une tribu sacr�e, la purifia avec de l'eau de source d'un cours
intarissable et avec les sacrifices que la loi prescrit dans ces circonstances
d'offrir � Dieu ; et il leur confia le tabernacle et les ustensiles sacr�s
et tout ce qu'on avait fabriqu� pour couvrir le tabernacle, afin qu'ils fissent
leur service sous le commandement des pr�tres ; car ces objets avaient d�j�
�t� consacr�s � Dieu.
2.
Au sujet des animaux, il distingua en d�tail ceux dont on se nourrirait et
ceux, au contraire, dont on ne cesserait de s'abstenir. A ce sujet, lorsque nous
aurons l'occasion d'en traiter, nous nous expliquerons tout au long, en
proposant les raisons qui l'ont d�termin� � nous d�clarer les uns
comestibles, et � nous prescrire de nous abstenir des autres. Mais le sang,
il nous l'a tout a fait interdit en tant qu'aliment, car il pense qu'il est l'�me
m�me et le souffle vital. Il nous a d�fendu �galement
la consommation de la chair d'une b�te morte d'elle-m�me, et nous a prescrit
de nous abstenir de la membrane qui couvre les intestins, ainsi que du suif des
ch�vres, des brebis et des b�ufs.
3.
Il bannit de la ville ceux qui ont le corps afflig� de l�pre et ceux qui ont
un flux s�minal surabondant. Les femmes aussi chez qui surviennent des s�cr�tions
naturelles, il les �loigne jusqu'au septi�me jour ; apr�s quoi, consid�r�es
comme pures, elles peuvent revenir dans leurs maisons. Il en est de m�me pour
ceux qui ont enseveli un mort ;
apr�s le m�me nombre de jours, ils peuvent revenir au milieu des autres. Celui
qui d�passe ce nombre de jours en �tat de souillure, la loi veut qu'il
sacrifie deux agnelles, dont l'une doit �tre br�l�e et dont l'autre est prise
par les pr�tres. On fait les m�mes sacrifices en cas de flux s�minal :
celui qui a eu un flux s�minal pendant le sommeil, sera, apr�s s'�tre plong�
dans l'eau froide, dans la m�me situation que ceux qui ont cohabit� l�gitimement
avec leurs femmes. Mais les l�preux, c'est d'une fa�on d�finitive qu'il les
�loigne de la ville, sans qu'ils puissent avoir commerce avec personne ;
ils ne sont pas autre chose que des cadavres.
Mais si quelqu'un par des pri�res adress�es � Dieu est d�livr� de cette
maladie et recouvre l'�piderme de la sant�, il en remercie Dieu par divers
sacrifices dont nous parlerons plus tard.
4.
Tout cela permet de rire des gens
qui pr�tendent que Mo�se, frapp� de la l�pre, dut s'enfuir lui-m�me de l'�gypte
et, s'�tant mis � la t�te de tous ceux qu'on avait chass�s pour le m�me
motif, les conduisit en Chanan�e. Car, si c'�tait vrai, Mo�se n'aurait pas �dict�,
pour sa propre humiliation, de pareilles lois, contre lesquelles il est
vraisemblable qu'il e�t protest�, si d'autres les avaient promulgu�es,
surtout quand chez beaucoup de nations les l�preux jouissent des honneurs et
non seulement �chappent aux injures et � l'exil, mais m�me occupent les
fonctions militaires les plus en vue, administrent les charges publiques et ont
le droit de p�n�trer dans les lieux saints et dans les temples. De sorte que
rien n'emp�chait Mo�se, si ou lui ou le peuple qui l'accompagnait avait eu la
peau d�t�rior�e par un accident de ce genre, d'instituer au sujet des l�preux
une l�gislation des plus favorables, sans les condamner � la moindre peine.
Mais il est clair que, s'ils s'expriment ainsi sur notre compte, c'est l'esprit
de d�nigrement qui les y incite ; pour Mo�se, c'est en homme indemne de
ces choses-l�, au milieu d'un peuple indemne, qu'il a fait des lois � propos
de ce genre de malades, et c'est en l'honneur de Dieu qu'il en usait ainsi.
D'ailleurs, sur ce sujet chacun juge comme il l'entendra.
5.
Aux femmes qui ont accouch� il interdit d'entrer dans le sanctuaire et de
toucher � quelque chose de saint jusqu'apr�s quarante jours, si c'est un
enfant m�le ; le nombre se trouvait doubl�, si c'�tait une fille. Mais
elles y p�n�trent, pass� le terme pr�cit�, pour offrir des sacrifices, que
les pr�tres consacrent � Dieu.
6.
Si quelqu'un soup�onne sa femme d'avoir commis un adult�re, il apporte un
assar�n d'orge moulue et, apr�s en avoir r�pandu une poign�e en offrande �
Dieu, on en donne le reste � manger aux pr�tres.
Quant � la femme, un pr�tre la place aux portes, qui sont tourn�es en face du
temple et, lui enlevant son voile de la t�te, il commence par �crire le nom de
Dieu sur une peau
et il l'invite � d�clarer par serment qu'elle n'a aucun tort envers son mari,
mais que, si elle a viol� les biens�ances, sa main droite se d�sarticule, que
sou ventre se consume et qu'elle p�risse ainsi ; que si c�est par exc�s
d�amour et cons�quemment par jalousie que son mari s'est laiss� entra�ner t�m�rairement
� la soup�onner, qu'il lui naisse au dixi�me mois un enfant m�le.
Ces serments achev�s, apr�s avoir effac� le nom de Dieu de la peau, il la d�laye
dans une coupe, puis, prenant un peu de terre du sanctuaire, ce qu'il trouve
sous la main, il l'y r�pand et le lui donne � boire. Alors, si elle a �t�
injustement incrimin�e, elle devient enceinte et le fruit de ses entrailles
parvient � terme ; mais, si elle a tromp� son mari dans son mariage et
Dieu dans son serment, elle p�r�t d'une mort ignominieuse, sa cuisse se d�jetant
et l'hydropisie gagnant ses entrailles. Voil� au sujet des sacrifices et de la
purification qui s'y rapporte, ce que Mo�se prescrivit � ceux de son peuple et
voil� les lois qu'il leur a donn�es.
Chapitre
XII
1.
L'adult�re il l'interdit absolument, pensant qu'il serait heureux que les
hommes eussent des id�es saines touchant le mariage et qu'il y allait de l'int�r�t
des cit�s et des familles que les enfants fussent l�gitimes. La loi d�fend
aussi comme un tr�s grand crime de s'unir � sa m�re. De m�me, avoir commerce
avec une �pouse de son p�re, avec une tante, avec une s�ur, avec la femme de
son fils est un acte d�test� comme une infamie abominable. Il interdit d'avoir
commerce avec une femme � l'�poque de ses souillures p�riodiques, de chercher
� s'accoupler aux b�tes ou d'aspirer � s'unir avec un m�le, entra�n� par
leurs attraits � la poursuite d'une volupt� immorale. Pour tous ceux qui
oseraient violer ces lois il d�cr�te la peine de mort.
2.
Pour les pr�tres, il exige une double puret� ; il leur d�fend ce qui pr�c�de
comme � tout le monde et, en outre, il leur interdit d'�pouser les prostitu�es,
il leur interdit aussi d'�pouser une esclave ou une prisonni�re de guerre ainsi que les femmes qui
gagnent leur vie en tenant un petit commerce ou une h�tellerie,
ou celles qui se sont s�par�es de leurs premiers maris pour n'importe quel
motif. Quant au grand-pr�tre, m�me une femme dont le
mari est mort, il ne lui accorde pas de l'�pouser, tandis qu'il le conc�de aux
autres pr�tres ; il n'y a qu'une vierge qu'il l'autorise � �pouser, et
il doit la garder.
Aussi le grand-pr�tre ne s'approche pas non plus d'un mort,
tandis qu'il n'est pas d�fendu aux autres pr�tres de se tenir aupr�s d'un fr�re,
d'un p�re, d'une m�re ou d'un fils d�funt.
Ils doivent �tre exempts de tout d�faut corporel.
Un pr�tre qui ne serait pas tout � fait sans d�faut, il l'autorise � prendre
sa part des viandes sacr�es
avec les autres pr�tres ; mais quant � monter sur l'autel et � p�n�trer
dans le sanctuaire, il le lui d�fend. Ce n'est pas seulement pendant
l'accomplissement des sacrifices qu'ils doivent �tre purs, ils doivent veiller
aussi � leur vie priv�e, t�cher qu'elle soit sans reproche. Et c'est pourquoi
ceux qui portent la robe sacerdotale sont sans d�faut, purs � tous �gards et
sobres, car le vin leur est d�fendu tant qu'ils portent la robe.
De plus ils n'immolent que des victimes enti�res et qui n'ont subi aucune
mutilation.
3.
Telles sont les lois, d�j� en usage � l'�poque o� il vivait, que Mo�se
nous a transmises ; mais il en est d'autres que, tout en vivant dans le d�sert,
il institua par avance, afin qu'on les appliqu�t apr�s la conqu�te de la
Chanan�e. Pendant la septi�me ann�e il fait reposer la terre du travail de la
charrue et de la plantation, de m�me qu�il a prescrit aux hommes de cesser
leurs travaux le septi�me jour. Quant aux produits spontan�s du sol, la
jouissance en est publique et libre, non seulement pour ceux du peuple, mais
aussi pour les �trangers, car on n'en conserve rien. 0n devait �galement en
user ainsi apr�s la septi�me semaine d'ann�es, ce qui fait en tout cinquante
ann�es. Les H�breux appellent la cinquanti�me ann�e Y�bel(os) ;
� cette �poque les d�biteurs sont tenus quittes de leurs dettes,
les esclaves sont renvoy�s affranchis, du moins ceux qui sont du peuple et que
pour une transgression d'une loi il a ch�ti�s en leur imposant la condition
servile, sans les condamner � mort,
il restitue les champs � leurs propri�taires primitifs de la fa�on suivante.
Quand survient le Y�bel - ce mot signifie libert�
-, arrivent ensemble le vendeur du champ et l'acqu�reur, et, apr�s avoir
supput� les revenus et les frais occasionn�s par le champ,
s'il se trouve que ce sont les revenus qui l'emportent, le vendeur recouvre le
champ ; mais si les d�penses exc�dent, le vendeur doit combler le d�ficit,
sous peine de perdre son bien. Mais si le chiffre est le m�me des revenus et
des d�penses, le l�gislateur rend la terre aux premiers possesseurs. Pour les
maisons, il a voulu que la m�me loi f�t en vigueur, s'il s'agit de maisons de
village qu'on a vendues. Mais pour la vente de maisons de ville, il a statu�
diff�remment : si, avant la fin de l'ann�e, on restitue l'argent, il
oblige l'acqu�reur � rendre la maison ; mais si une ann�e pleine se
passe, il confirme son acquisition � l'acqu�reur. Telle est la constitution l�gale
que Mo�se, pendant le temps qu'il faisait camper l'arm�e au pied du Sina�, re�ut
de Dieu et transmit par �crit aux H�breux.
4.
Comme la l�gislation lui paraissait bien r�gl�e, il s'occupa ensuite du
recensement de l'arm�e, songeant d�sormais � s'appliquer aux affaires
relatives � la guerre. Il ordonne aux chefs de tribus, � l'exception de la
tribu de L�vi, de faire le compte exact des hommes aptes au service militaire :
les L�vites, eux, �taient consacr�s et exempts de toute charge. Le
recensement ayant eu lieu, il se trouva 603.650 hommes aptes � porter les
armes, �g�s depuis 20 ans jusqu'� 50. A la place de L�vi, il
choisit comme phylarque Manass�, fils de Joseph, et Ephra�m au lieu de Joseph,
conform�ment � ce que Jacob avait sollicit� de Joseph, � savoir de lui
donner ses enfants en adoption, ainsi que je l'ai d�j� rapport�.
5.
Quand ils dressaient le camp, ils pla�aient le tabernacle au milieu d'eux ;
trois tribus s'installaient le long de chaque c�t� et des chemins s'ouvraient
entre elles. On am�nageait une agora, et les marchandises �taient rang�es
chacune � sa place ; les artisans de tout genre avaient leurs ateliers, et
cela ne ressemblait � rien moins qu'� une ville d�m�nageant d'ici pour aller
s'installer l�. L'emplacement autour du tabernacle �tait occup� d'abord par
les pr�tres,
puis par les L�vites qui �taient en tout - car on les recensait aussi, tous
les m�les depuis l'�ge de trente jours - au nombre de 23.880.
Et pendant tout le temps
que la nu�e se trouvait au-dessus du tabernacle, ils pensaient qu'ils devaient
demeurer, comme si Dieu r�sidait l�, et lever le camp, au contraire, quand la
nu�e se d�pla�ait.
6.
Mo�se inventa une sorte de cor qu'il fit faire en argent. Voici en quoi il
consiste. Sa longueur est d'un peu moins d'une coud�e ; c'est un tube �troit,
un peu plus �pais qu'une fl�te, avec une embouchure d'une largeur suffisante
pour recevoir l'inspiration, et une extr�mit� en forme de clochette comme en
ont les trompettes. Il s'appelle as�sra en h�breu. Il s'en fit deux :
l'un servit � convoquer et a r�unir le peuple en assembl�e. Quand l'un de ces
cors donnait le signal, il fallait que les chefs se r�unissent pour d�lib�rer
sur leurs affaires � eux ; avec les deux ensemble on rassemblait le
peuple. Quand le tabernacle se d�pla�ait, voici ce qui arrivait : au
premier signal, ceux qui avaient leur campement � l'est se levaient, au second
c'�taient ceux qui �taient install�s au sud. Ensuite, le tabernacle d�mont�
�tait port� entre les six tribus qui marchaient en avant et les six qui
suivaient. Les L�vites �taient tous autour du tabernacle. Au troisi�me
signal, la partie du campement situ�e � l'ouest s'�branlait et, au quatri�me,
la partie nord. On se servait aussi de ces cors dans les c�r�monies des
sacrifices ;
on en sonnait pour faire approcher les victimes, tant aux sabbats
qu'aux autres jours. Ce fut � ce moment pour la premi�re fois
depuis le d�part d'Egypte qu�il fit le sacrifice dit Pascha dans le d�sert.
Chapitre
XIII
1.
Apr�s avoir attendu quelque temps, il l�ve le camp pour s'�loigner du mont
Sina�, et, apr�s quelques �tapes dont nous parlerons, il parvient en un
endroit nomm� Eserm�th .
L�, le peuple recommence � se r�volter et � reprocher � Mo�se les �preuves
subies pendant leurs p�r�grinations : apr�s qu'il les avait persuad�s
de quitter un pays fertile, non seulement ce pays �tait perdu pour eux, mais,
au lieu de la f�licit� qu'il s��tait engag� � leur procurer, voil� au
milieu de quelles mis�res ils vagabondaient, manquant d'eau, et, si la manne
venait � faire d�faut, destin�s � p�rir tout net. Au milieu de ce flux de
paroles violentes contre cet homme, quelqu'un les suppliait de ne pas m�conna�tre
Mo�se et ce qu'il avait souffert pour le salut de tous et de ne pas d�sesp�rer
du secours de Dieu. Mais cela ne faisait qu'exciter le peuple davantage et il ne
s'emportait qu'avec plus de tapage encore contre Mo�se. Celui-ci, pour leur
rendre courage dans ce grand d�sespoir, leur promet, bien qu'indignement outrag�
par eux, de leur procurer de la viande en quantit�, non pour un jour seulement,
mais pour plusieurs. Mais, comme ils n'y croyaient pas et que quelqu'un
demandait d'o� il assurerait � toutes ces myriades cette abondance annonc�e : � Dieu,
dit-il, et moi-m�me, encore que mal jug�s par vous, nous ne laisserons pas de
faire effort pour voire bien, et le moment n'en est pas �loign� �. En m�me
temps qu'il parlait, le camp tout entier se remplit de cailles ;
on les entoure et on les ramasse. Cependant Dieu, peu apr�s, ch�tie les H�breux
de l'arrogance injurieuse qu'ils lui avaient t�moign�e : il en p�rit, en
effet, en assez bon nombre. Et, encore aujourd'hui, cette localit� porte le
surnom de Kabr�thaba,
c'est-�-dire Tombeaux de la concupiscence.
Chapitre
XIV
1.
Apr�s les avoir men�s de l� vers l'endroit appel� Pharanx,
situ� pr�s des fronti�res des Chanan�ens et d'un s�jour p�nible, Mo�se r�unit
le peuple en assembl�e et se dressant parmi eux : � Des deux biens,
dit-il, que Dieu a r�solu de nous procurer, la libert� et la possession d'un
pays fertile, le premier il vous l'a d�j� donn� ; vous le tenez, et le
second vous allez le recevoir bient�t : nous sommes camp�s, en effet, sur
les fronti�res des Chanan�ens et d�sormais dans notre marche en avant, non
seulement ni roi, ni ville ne nous arr�teront, mais non pas m�me tout leur
peuple r�uni. Pr�parons-nous donc � l'�uvre : car ce n'est pas sans
coup f�rir qu'ils nous c�deront leur territoire, c'est apr�s de grandes
luttes qu'ils en seront d�poss�d�s. Envoyons donc des explorateurs qui
jugeront des qualit�s du pays et de quelles forces ils disposent. Mais, avant
tout, soyons d'accord et honorons Dieu, qui, en toutes circonstances, nous
secourt et combat avec nous. �
2.
Mo�se ayant ainsi parl�, le peuple lui rend hommage et choisit douze
explorateurs des plus notables, un par chaque tribu. Ceux-ci, partis de la
fronti�re d'�gypte, apr�s avoir parcouru la Chanan�e tout enti�re, arrivent
� la ville d'Amath� et aux monts Liban, et ayant �tudi� � fond la nature du
pays et des gens qui l'habitaient, ils reviennent, n'ayant employ� que quarante
jours pour toute l'exp�dition, et apportant en outre avec eux des fruits du
pays. La beaut� de ces fruits
et l'abondance des bonnes choses que le pays renfermait, � les entendre,
excitaient l'ardeur guerri�re du peuple. Mais ils les effrayaient, en revanche,
par les difficult�s de la conqu�te, disant que les fleuve s'�taient
infranchissables,
tant ils �taient larges et profonds tout ensemble, que les montagnes �taient
inaccessibles aux voyageurs, et que les villes �taient fortifi�es par des
remparts et de solides enceintes. Dans H�bron, ils pr�tendaient avoir retrouv�
les descendants des g�ants. C'est ainsi que les explorateurs, ayant remarqu�
que les choses en Chanan�e avaient un aspect plus formidable que tout ce qu'ils
avaient rencontr� depuis le d�part de l'�gypte, non seulement se montraient
personnellement constern�s, mais essayaient de faire �prouver au peuple les m�mes
impressions.
3.
Ceux-ci, apr�s ce qu'ils ont entendu, estiment impraticable la conqu�te du
pays et, rompant l'assembl�e, ils s'en vont se lamentant avec leurs femmes et
leurs enfants, comme si Dieu ne leur apportait en fait aucun secours, se bornant
� des promesses en paroles. Et, derechef, ils incriminaient Mo�se et
l'accablaient de reproches, lui et son fr�re Aaron, le grand-pr�tre. Ce fut
dans ces f�cheuses dispositions, en les chargeant tous deux d'injures, qu'ils
pass�rent la nuit. Le lendemain matin, ils courent tous se former en assembl�e,
avec le dessein, apr�s avoir lapid� Mo�se et Aaron, de s'en retourner en �gypte.
4.
Mais deux des explorateurs, Josu�, fils de Noun, de la tribu d'�phra�m, et
Chaleb(os) de la tribu de Juda, effray�s, s'avancent au milieu d'eux et
contiennent le peuple, le suppliant de reprendre courage, de ne pas accuser Dieu
de dires mensongers et de ne pas avoir foi en ceux qui les avaient terrifi�s
par de faux r�cits au sujet des Chanan�ens, mais dans ceux qui les exhortent
� marcher vers la prosp�rit� et la conqu�te du bonheur. Car ni la hauteur
des montagnes, ni la profondeur des fleuves, s'ils �taient hommes d�une
valeur exerc�e, ne feraient obstacle � leur activit�, surtout si Dieu
joignait ses efforts aux leurs et combattait pour eux. � Marchons donc,
disaient-ils, contre nos ennemis, sans aucune arri�re-pens�e, mettant notre
confiance en Dieu, qui nous conduit et suivez-nous, nous qui vous montrons le
chemin �. Par ces paroles, ils essayaient d'att�nuer le ressentiment du
peuple ; quant � Mo�se et � Aaron, prostern�s � terre, ils suppliaient
Dieu, non pour leur propre salut, mais pour qu'il tir�t le peuple de son
ignorance, et rassit leurs esprits troubl�s par les difficult�s et les
souffrances actuelles. Alors apparut la nu�e, qui, en se posant au-dessus du
tabernacle, manifesta la pr�sence de Dieu.
Chapitre
XV
1.
Mo�se, encourag�, s'approche du peuple et annonce que Dieu, �mu de leurs
injures, leur fera subir une punition, non pas sans doute proportionn�e �
leurs fautes, mais telle que les p�res en infligent � leurs enfants pour les
remettre � la raison. Comme il �tait entr�, en effet, dans le tabernacle et
qu'il suppliait Dieu de d�tourner la destruction que le peuple allait attirer
sur lui, Dieu lui avait rappel� d'abord comment, apr�s tout ce qu'il avait
fait pour eux, apr�s tant de bienfaits re�us de lui, ils en �taient venus �
ne lui t�moigner que de l'ingratitude ; comment, � pr�sent, entra�n�s
par la l�chet� des explorateurs, ils avaient jug� leurs rapports plus v�ridiques
que sa propre promesse ; et voil� pourquoi, sans toutefois les perdre
tous, sans an�antir enti�rement leur race, dont il faisait plus de cas que du
reste des humains, cependant il ne leur permettrait pas � eux de s'emparer du
pays de Chanaan, et de jouir de sa prosp�rit�. Il les forcerait, sans foyer,
sans patrie, de v�g�ter pendant quarante ans dans le d�sert, en expiation de
leurs p�ch�s. � Cependant
� nos enfants, dit-il, il promet de donner ce pays et de les faire ma�tres de
tout ce dont vous vous �tes priv�s vous-m�mes, faute d'empire sur vous. �
2.
Quand Mo�se leur eut ainsi parl� selon la pens�e de Dieu, le peuple
fut en proie au chagrin et � la douleur, et supplia Mo�se de le r�concilier
avec Dieu, et, les arrachant � cette vie vagabonde � travers le d�sert, de
leur donner des villes. Mais il d�clara que Dieu n'autoriserait pas pareille
tentative : car ce n'�tait pas � la l�g�re, comme les hommes, que Dieu
avait �t� port� � se courroucer contre eux ; il avait pris une d�cision
bien r�fl�chie � leur endroit. On ne doit pas juger invraisemblable que Mo�se,
� lui seul, ait calm� tant de myriades d'hommes on fureur et les fit amen�es
� plus de mansu�tude ; c'est que Dieu, qui l'assistait, pr�para le
peuple � se laisser convaincre par ses paroles et que souvent, apr�s avoir d�sob�i,
ils se persuadaient de l'inutilit� de leur r�bellion [par les aventures f�cheuses
o� ils �taient pr�cipit�s].
3.
L'admiration que ce grand homme excitait par ses vertus et la puissance
persuasive de ses discours, il ne l�inspira pas seulement � l'�poque o� il
v�cut, il en est digne encore aujourd'hui. Certes, il n'est pas un H�breu qui
n'ob�isse, comme s'il �tait encore l� et qu�il d�t le ch�tier d'un
manquement, aux lois que Mo�se a promulgu�es, m�me s'il pouvait les violer en
cachette. Et il est bien d'autres t�moignages de sa puissance surhumaine :
nagu�re quelques habitants d'au-del� de l'Euphrate, apr�s un voyage de quatre
mois entrepris par v�n�ration pour notre temple, effectu� au prix de beaucoup
de dangers et de d�penses, ayant offert des sacrifices, ne purent pas prendre
leur part des chairs sacr�es, parce que Mo�se, les a interdites � ceux qui
n'ont pas nos lois ou qui ne sont pas en rapport avec nous par les usages de
leurs p�res. Les uns alors, sans avoir offert aucun sacrifice, les autres,
laissant l� leurs sacrifices � moiti� accomplis, la plupart ne pouvant m�me
d'aucune fa�on p�n�trer dans le temple, s'en retourn�rent, aimant mieux se
conformer aux prescriptions de Mo�se que d'agir selon leur propre d�sir,
d'ailleurs, ne craignant pas que personne vint leur rien reprocher � ce sujet,
mais redoutant seulement leur propre conscience. Ainsi cette l�gislation qui
parut �maner de Dieu eut pour effet de faire para�tre cet homme encore plus
grand que nature. Mais, bien mieux encore, un peu avant la guerre r�cente,
quand Claude gouvernait les Romains et quand Isma�l(os)
�tait grand-pr�tre chez nous, la famine ayant s�vi dans notre pays, au point
qu'un assar�n se vendait quatre drachmes, et qu'on avait apport� pour la f�te
des azymes 70 cors de larme - ce qui fait 31 (?) m�dimnes siciliens, ou 41
attiques -, aucun des pr�tres
n'osa consommer un seul pain, alors qu'un tel d�nuement pesait sur le pays, par
crainte de la loi et du courroux que montre toujours la divinit� m�me pour des
p�ch�s qui �chappent � tout contr�le. Ainsi il ne faut pas s'�tonner de ce
qui s'accomplit alors, quand jusqu'� notre �poque les �crits laiss�s par Mo�se
ont une telle autorit� que les ennemis eux-m�mes conviennent que notre
constitution a �t� �tablie par Dieu m�me par l'entremise de Mo�se et de ses
vertus.
Au reste sur ce sujet que chacun se fasse l'opinion qu'il lui plaira.
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